Saison Un

: Obscure Prophétie

Le mois dernier avait été éprouvant pour tout le monde, humains comme pokémons. Malgré les derniers évènements, Roger s’estimait chanceux. Son frère et sa grand-mère étaient toujours là, bien présents. Quant à Ambroise, son Skitty, il était revenu sain et sauf. Bien sûr le chaton avait été dans un état pitoyable mais après un bon bain et une ration de croquette largement méritée, il avait rapidement repris du poil de la bête.

Désormais que les liens entre humains et pokémons étaient rétablis grâce au sacrifice d’un courageux Pitrouille, Roger pouvait enfin reprendre là où il s’était arrêté… ou plutôt, commencer ce qu’il n’avait pu commencer. Son projet d’élevage n’avait même pas eu le temps de voir le jour. Le botaniste comptait donc se remettre très prochainement en route. Sa licence en poche, il avait déjà quelques pistes pour la suite de son aventure.

Avant toute chose, le scientifique devait correctement se préparer. De plus, sa grand-mère lui avait donné une longue liste de course, les réserves de nourritures s’étant largement épuisées dans la maison. Ainsi, il se rendit au marché de Frîme, du moins ce qu’il en restait. Le marché avait clairement perdu de sa splendeur. Cependant, quelques braves maraichers avaient décidé de continuer leur activité et de proposer leurs produits.

Fidèle à lui-même, Ambroise guida le botaniste à travers les étals, comme si le chat connaissait déjà leur nouvel emplacement. Dès qu’ils passèrent devant un stand intéressant, le félin rappela à l’ordre la tête en l’air qui lui servait de dresseur.

- Décidément, je ne sais pas comment j’ai fait sans toi pendant un mois.

C’était vrai. Roger s’était attaché à ce chat plus que de raison. Plus que jamais, il se rendait compte à quel point la présence d’Ambroise lui importait énormément. A ces flatteries, le chat se dressa fièrement. Lui non plus ne comprenait pas comment Roger avait survécu sans lui.

- Prochaine étape : les légumes pour la Rattatatouille de ce soir ! Ma spécialité ~

En guise de réponse, Ambroise hocha vivement la tête. Il fallut seulement quelques secondes pour trouver l’étale à légumes. A cause de Famine, Roger craignait se trouver face à des choix limiter et revenir bredouille. Cependant, ce fut l’inverse. Il y avait tellement de choix ! Le botaniste allait forcément oublier un des légumes qui se trouvaient sur la liste…

Alors qu’il allait choisir un bouquet de carottes, sa main frôla une autre. Hâtivement, Roger enleva sa main pour éviter quelconque malentendu.

- Excusez-moi, s’empressa-t-il d’ajouter.

C’était une jeune femme au teint halé qui l’avait ainsi frôlé. Son bras en écharpe et les diverses traces sur sa peau prouvaient qu’elle avait elle aussi souffert des derniers évènements. Cependant, ce fut son air troublé que Roger remarqua en premier. Il ne savait pas exactement s’il devait se sentir flatté ou vexé par la façon dont elle le regardait. Néanmoins, la jeune femme retrouva de sa contenance et se confondit en excuse.

- Oh, pas de soucis ! Je suppose que ce sont des choses qui arrivent.

Apparemment, le botaniste avait un sosie quelque part à Mistral. Il était bien curieux de rencontrer cet homme qui lui ressemblait. Cependant, pour éviter un malaise et détendre un peu l’atmosphère, le scientifique préféra changer de sujet.  
- Il semblerait qu’on soit intéressé par les mêmes ingrédients. Vous aussi vous comptez préparer une Rattatatouille ? demanda-t-il en souriant.  

Aux dires de la jeune femme, Roger hocha vivement la tête. Evidemment qu’il connaissait la brandade de morue ! Il était lui-même originaire de Frîme. Sa grand-mère aimait ajouter de l’ail au plat. Beaucoup d’ail…

- Effectivement, ce plat ne m’est pas inconnu, répondit le botaniste sur un ton amusé. Je suis originaire d’ici. Enchanté Sérène, je m’appelle Roger Ranium.

Ambroise, en revanche, fut moins enchanté par cette rencontre. Voilà que le Lakmécygne de cette inconnue lui tirait les oreilles ! Oh ! Le chaton feula pour montrer son mécontentement. Ce n’était pas une façon correcte de se présenter. Bien sûr, les agissements du cygne étaient passés inaperçus auprès de leur dresseur respectif. Pitié que Roger achète vite fait ses légumes, que le chat puisse se tenir éloigné de cet horrible personnage.

Evidemment, Roger fit tout l’inverse. Sur les bons conseils de Sérène, il la suivit vers un autre marchand. Celui-ci proposait un choix bien plus varié en légume, à croire qu’il ne connaissait rien de l’apocalypse. Le botaniste eu même droit à une belle ristourne, si ce n’était pas merveilleux !

Ce le fut moins pour Ambroise. Il se faisait littéralement malmené par cet horrible Lakmécygne. Pire ! Sa dresseuse semblait même ravie du comportement de son pokémon !

- Votre pokémon et le mien n’ont pas la même notion du mot « amusement », murmura Roger sur un ton pleins de reproche.

Cette fois-ci, les agissements de l’oiseau blanc avaient été pris en flagrant délit. Malgré ça, la jeune femme ne fit aucune remarque à celui-ci. Que du contraire. Roger la dévisagea un instant mais trop tard, Sérène était déjà occupée ailleurs. Ou alors était-ce fait exprès ? Dans tous les cas, le botaniste n’aimait pas la façon dont son chat était traité. Le scientifique s’accroupit et fit un signe vers le félin pour l’inviter à se rapprocher de lui.

- Ambroise, sur mon épaule.

Le Skitty ne se fit pas prier, bondissant sur l’épaule du jeune homme pour se mettre à l’abri de cet insupportable Lakmécygne. Visiblement, sa dresseuse ne lui avait pas appris quelques règles élémentaires en matière de respect et politesse… Un dernier feulement en guise de reproche et Ambroise redressa fièrement la tête, histoire de ne pas perdre la face auprès cet oiseau de malheur.

Pendant que Sérène était occupée par les courbettes d’un inconnu, Roger put choisir tranquillement les meilleurs légumes pour son repas du soir.

La conversation allait bon train. D’abord, l’aîné insinua de manière peu subtile que le botaniste et la dénommée Sérène entretenaient une relation intime. Si Roger avait parfaitement compris qu’il s’agissait d’une pointe d’humour pour l’intégrer à la conversation, il répondit seulement par un rictus gêné. Heureusement, la discussion dévia rapidement sur divers sujets, mais le principal était sans nul doute la nourriture. Monsieur Tremblotti semblait particulièrement intéressé par les spécialités culinaires de Mistral. Une passion que respectait entièrement Roger. De manière parfaitement objective, le scientifique devait bien admettre que la cuisine mistraloise était absolument délicieuse.

Bien sûr, rien ne se passait jamais comme prévu. Surtout pas à Mistral. Il fallut que la maraichère accuse l’aîné de vol. Pourtant, Roger se tenait juste devant lui. Si Lorenzo avait voulu la marchandise, le scientifique l’aurait immédiatement remarqué. Dans un premier temps, il essayait de défendre le spécialiste Spectre.

- Il doit y avoir erreur, Madame. Si cet homme avait voulu voler un de vos produits, je l’aurais vu.

Evidemment, la marchande ne voulu rien entendre. Au lieu de ça, elle leur ordonna de vider à tous leur sac de courses, sans oublier, au passage, de les traiter de voleurs. De fait, un œuf de Noeunoeuf se trouvait parmi les affaires de Lorenzo. Au vu de la réaction du pokémon, il était évident qu’il voulait prendre la fuite. Le sac de Lorenzo s’était présenté comme une opportunité parfaite à l’œuf de ne pas finir en omelette. Non content d’être pris au dépourvu, il lança une Hypnose à l’aîné… qui se voyait ainsi transformer en macho typique de Kalank.

- Monsieur Tremblotti, vous vous occuperez plus tard de la gente féminine. D’abords, on va tenter de ne pas finir avec une amende à cause de ce Noeunoeuf, fit Roger dans son flegme habituel. Allez, montrons tous notre sac pour que Madame comprenne bien que nous ne sommes pas des voleurs.

Roger commença à montrer l’exemple en ouvrant grand son panier. En plus des achats qu’il avait effectué précédemment, se trouvait effectivement un autre œuf. Débusqué, la seconde partie du pokémon rejoignit aussitôt la tête pensante du groupe de six.

Au final, tous les œufs furent retrouvés dans les affaires de chacun et le groupe put s’en sortir, malgré l’énorme malentendu avec la marchande.