Jade, qui souhaite profiter de cette heure de répit comme si c’était la dernière, propose donc de pimenter cette heure avec une petite chasse du déjeuner purement Biopokés. Théa n’a aucun doute que la demoiselle à la chevelure noire n’avait qu’une envie : démontrer son incroyable talent de survie en pleine forêt pour l'impressionner, non sans lui faire montrer des choses qu’elle aurait pu ne pas voir.
C’est un vrai petit Ouisticram. Comme hier, elle se serre de Croc-Rouge comme appuie pour monter aux arbres et attraper quelques baies Sitrus en suspens. Seulement les meilleurs. Par contre, ne comptez pas sur elle pour donner simplement. Elle est joueuse, elle est taquine.
Allez grimpe !
Pourquoi je l’ai vu venir à cinq kilomètres ?
Si tu as faim, il faut que tu grimpes !
En bonne fille de la ville et en sportive peu convaincue, ce n’est certainement pas avec autant d’élégance et d’aisance que Théa grimpera à l’arbre. Croc-Rouge devra même lui donner une petite impulsion en donnant un petit coup de reins pour que la jeune fille se retrouve sur les branches, retenue de justesse par une Jade hilare.
C’est pas gentil !
Je ne me moque pas, c’est nerveux !
A d’autres !
Théa se redresse sur la branche et croise les bras. Elle boude. Nah. Cela lui apprendra à se payer de sa tête. Enfin, la romancière avait peut-être oubliée : son amie n’aimait pas trop quand elle lui faisait la tête, même si c’était purement exagéré. La voilà à ses côtés.
Ne boude pas…
Hé… C’était une blague.
Théa attrape une baie Sitrus en souriant, lui donnant un gentil coup d’épaule pour lui redonner le sourire puis regarde en bas. Il y avait un petit parterre de fleurs tout à fait adorable et dedans, une petite créature violette en train de les cueillir.
Tu crois que les pokémons peuvent être romantique ?
Surtout les Nidorans. Il doit chercher une femelle à séduire !
Ca me rappelle quelqu’un tiens.
J’étais si maladroite à l’époque...
Mais ça me dérange pas si tu recommences aujourd’hui.
Théa regarde Jade. Aie. Là, elle poussait sa chance un peu trop loin. Il était temps de lui dire stop.
En toute amitié.
Si tu le dis.
Je suis sérieuse.
Hein hein.
Jade !
Son regard bleu devient sévère, mais dès qu’elle tourne la tête et lui lance son sourire, l’esprit de Théa devient plus faible et son souffle se coupe.
Il y a ce que tu dis et ce que tu veux.
Tu peux te donner toutes les façades que tu veux pour les autres, moi je saurais toujours ce que tu souhaites réellement.
...
Mais je l’aime.
Ta plus grande qualité et ta plus grande faiblesse : tu aimes beaucoup de monde de façon inconditionnelle.
Jade regarde le Nidoran qui semble avoir fini sa composition. Il semble aussi très content.
C’est comme choisir une vie toute rangée et simple comme Lara ou une vie un peu plus risquée mais plus palpitante comme Jeanne.
Je sais quel livre tu préfères.
Puisqu’on est dans le thème, Théa avait toujours l’impression que Jade lisait en elle comme un livre ouvert. Cependant, elle se permet un rebondissement.
Tu m’as fait mal. Très mal.
Je le déplore et je ne cherche pas à me trouver des excuses. Je ne me pardonnerais jamais de t’avoir blessé comme ça.
Cependant, ne me demande pas de rien faire, alors que je vois que tu t’es blessée et que personne se sent visiblement assez concerné pour se dire que, peut-être, la célèbre romancière aurait besoin qu’on s’occupe d’elle.
Même si elle n’est pas du genre à le crier sur les toits.
Elle pose sa main sur sa joue, le regard plus perçant que jamais.
Je t’aime petit ange.
Je veux être là pour toi, surtout lorsque je vois que tu souffres seule en silence.
Ca je… je ne le supporte pas.
...
Depuis son retour, il y a trois ans, elle le savait. Elle savait que les choses allaient devenir compliquées. Pourtant, elle avait la sensation qu’elle la piégeait, sentimentalement, au moment où elle était la plus vulnérable. Ces moments où on ne pouvait pas crier “Tu as tort ! Ca se passe très bien dans ma vie ! “
Ce genre d’instant où elle se demande pourquoi elle continue de lutter contre elle-même. Contre ses bas instincts. Contre ses envies de tout foutre en l’air. Contre tout.
Allons… Elle n’était pas si seule que ça…
C’était une grande sœur, une fille avec des parents spectres certes, une amante, une vraie amie…
…
Non ?
Encore deux rencontres ou moins !