Saison Un

: Obscure Prophétie

Aurait-il fait une erreur ? Aurait-il ruiné sans le vouloir le spectacle qu’il souhaitait rejoindre ? Le Pitrouille recule, peiné, aux balbutiements de son idole. Pourquoi ce nom ? Pourquoi Kata ? Le spectre secoue la tête et tend ses ailettes, acclamant la grandeur du seul méritant. Kata n’est rien. Kata n’a jamais rien été. Une humaine parmi d’autres. Un hôte lui permettant d’acheminer la justice sur cette immondice Rapasdepic, tout au plus. Aucune promesse ne fut brisée en ce jour, puisqu’aucun lien n’a jamais existé en eux. Ciboulette n’a toujours embrassé qu’une destinée : celle de la scène.





À son acceptation, une lumière nouvelle s’élève au-devant de la mort, illuminant Vigneaux d’un espoir de rédemption. Tant d’âmes échouées au fil de sa lame. Tant d’âmes libérées si vite qu’elles en oublièrent la route à suivre.
Laissez-vous guider. Vous, fauchés par la mort, rejoignez-moi jusqu’à l’au-delà ! Venez participer à cette grandeur qu’un pays ne vit qu’une fois. Entrez, vous aussi, dans la danse de cette apocalypse.

Mon corps spectral se retire des embouchures de ma citrouille, révélant l’intense phare promis à mon camarade de scène. Aussitôt, la nuée d’âmes qui entourait Mort s’agite et me rejoint en lévitation. Les âmes voguent autour de moi, attirées par cette lumière qui ne brille que pour elles. Écoutez-les hurler. Regardez-les s’unir à moi. À nous. À cette œuvre destinée au pays tout entier. J’exulte d’un rire inarrêtable en les sentant m’envahir. Je sens chacun d’entre eux prendre place en mon corps qui ne cesse de gonfler sous la pression de centaines d’âmes.

Deux faisceaux d’un orange éblouissant s’élancent vers les cieux, véritable appel à l’intention des égarés. Personne ne sera délaissé. Tous auront droit au destin que leur offre la mort. Quant à moi, je serais son passeur.
Ni bon, ni mauvais, simple témoin destiné à guider les acteurs dans leur épilogue afin que ce jour marque le monde du souvenir que méritent ses personnages.

Mes pupilles ardentes se reportent sur Mort. J’ai l’impression de voir le monde différemment, à présent. Je ressens ces centaines d’âmes en moi qui hurlent à la mienne. Une folie qu’aucun Pitrouille ne dû vivre avant moi. Qu’importe les conséquences.
Mort. Je vous suivrais et assisterai à votre apogée, jusqu’à ce que cette histoire ne s’achève.
Peut-être serez-vous fier de moi ? Peu m’importe. Je ne souhaite que voir le meilleur de vous-même au plus près, sans perturber votre destinée.
Écoutez-les. Les âmes vous honorent. Chaque cri d’agonie est une prière en votre nom. Dressez-vous au-delà des foules, et offrez un épilogue épique à leurs vies d’inexistence.

Déjà, je vois la mort quitter la ville, se diriger vers la scène de notre prochaine prestation. Je la suis, simple lampion accroché à sa vie.



Mort et Ciboulette quittent Vigneaux.
Ciboulette passe taille Maxi.
Ciboulette passe Rouge.

Alors qu'Azur devait retrouver l'agent Anty Patike à Vigneaux, il aperçut un immense champ de ruines. La ville avait été en bonne partie ravagée. Avec horreur, effroi et une pointe de désespoir, il découvrit progressivement le chaos perpétré par les cavaliers de l'apocalypse, dont il n'avait pas encore eu vent de l'existence. Même son sang-froid de plus grand chanceux de Mistral, combiné à celui de Maître, fut mis à rude épreuve.

Qu'est-ce qui a pu provoquer ça ? Ou plutôt qui ? L'Ordre Noir est passé si vite à l'action !? On a même pas eu le temps de faire la succession de Nirvana que si ça se trouve, Mistral est déjà bien saccagée !

Le Maître devait absolument y remédier ! Il descendit de son vélo et sortit son bandeau. Il ne savait pas s'il allait devoir lutter à proprement parler, mais il mènerait dans tous les cas un combat des plus sérieux.


Le Maître demeurait prêt à appeler son équipe si besoin. Il avait eu vent de la malédiction, mais avait pris le risque de changer de Pokémon au cours du trajet. En l'occurrence, cinq membres de l'équipe officielle du Maître de l'Eau pourraient être convaincus de faire face aux menaces directes. Ils ne seraient certes pas à l'écoute d'Azur et ne se battraient pas pour lui. Toutefois, ils auraient tout intérêt à se battre contre de potentiels ennemis de Mistral, en ce qu'ils troubleraient également leur propre quiétude. La notion d'ennemi commun compenserait ainsi la perte de lien entre eux. De toute façon, indépendamment, les Pokémon d'Azur se connaissaient suffisamment bien mutuellement pour agir sans se gêner.

Azur constata alors que Blue était déjà dans les parages lorsqu'il aperçut cette dernière se déplacer à toute vitesse entre les ruines. Elle cherchait probablement Gunter. Le Maître décida de la suivre : ils finiraient a priori par tomber sur le responsable de tous ces dégâts matériels, avec un peu de chance.

Nana sortit par elle-même de sa Poké Ball et partit de son côté vers un point d'eau. Elle allait sans doute s'amuser à lancer des Embrochet sur l'ennemi. Peu importait, tant qu'elle ne se faisait pas attaquer par surprise. Cette crainte s'avéra d'ailleurs étrange, en ce que ce fut plutôt elle qui attaquait par surprise, justement. Quoi qu'il en fût, le Maître et Blue aperçurent alors une espèce de chevalier noir à l'allure des plus macabres. Il évoquait quelque chose de funeste, telle la mort. Cela plut d'autant moins à Azur qui manqua de peu de revivre des souvenirs d'enfance très douloureux. Lui-même ne s'en souvenait pas, mais le pressentait. Or, ce n'était pas le moment ! Il était avant tout un homme d'action plutôt que de réflexion, malgré sa candidature municipale !

La noirceur qu'il dégageait donnerait des sueurs froides au plus vivant, insouciant et chaleureux des mortels. Face à lui se dressait une jeune citoyenne visiblement impuissante qui ne souhaitait pas démordre pour autant. Elle protégeait deux enfants. Aussi courageux cela pût-il paraître, Azur se demanda si cela ne s'accordait pas plutôt avec l'adjectif téméraire, s'il avait bien retenu le mot.

Sans arme, parce qu'il n'y avait tout simplement pas pensé, le Maître se prépara à la rejoindre.

« Pas si vite ! J'ai aucune idée de ce qui se passe dans cette ville, mais j'arrive en renfort ! »

Trop tard : le cavalier quitta les lieux avec un Pitrouille. Le Maître se précipita alors en direction des trois civils.

« Bonjour ! Tout va bien ? Je vais vous aider à vous mettre à l'abri, c'est très dangereux ici ! »

Non, Azur ne laisserait pas la jeune citoyenne se battre s'ils recroisaient un ennemi. Une fois qu'elle serait convaincue de se réfugier, il continuerait à parcourir la ville en vue d'un potentiel autre danger ou d'autres citoyens à aider. De son côté, Blue repartit silencieusement à la recherche de Gunter.

« Ah bah moi qui ai failli croire qu'on s'appelait exactement pareil ! Enchanté, Adèle ! »

En situation sérieuse ou non, Azur Bain restait toujours Azur Bain, pour le meilleur et pour le pire. Adèle semblait sympathique, malgré une expression faciale étrangement enthousiaste à son égard. Peut-être était-elle fan ? Quoi qu'il en fût, le Maître prit la petite fille dans ses bras sans se poser de question.

« Je vois... Pas bête ! Merci pour ses informations ! »

Dommage que le danger pour elle fût trop grand : elle aurait sans doute fait une alliée importante dans la lutte directe contre les ennemis de Mistral. En cela, il valait mieux privilégier sa sécurité en prévision du jour où elle deviendrait plus puissante. Décidément, le Maître avait la chance de principalement rencontrer le fleuron de la jeune génération, ces derniers temps !

« Mais c'est donc ce fameux Pestilence qui a détruit la ville ? »

Adèle avait même eu l'intelligence de mettre des mots derrière ce nom. Ce cavalier paierait cher ce qu'il avait commis. Le Maître Pokémon sentait une véritable colère monter en lui, par frustration de son retard et compassion envers les innombrables victimes. Néanmoins, la sécurité des civils demeurait évidemment et indiscutablement prioritaire sur de quelconques accès d'émotions.

« Je vois... Merci encore pour cette information. Néanmoins, commençons par vous mettre à l'abri avec les enfants. C'est pas négociable : vous courez trop de risque. »

Il en profiterait pour faire ce qu'il avait prévu avec Anty : rallier Lise à leur poursuite de Lior et Técla, qui semblaient se défiler de la crise au lendemain du bal !

« Je sais chez qui aller, vu que je la cherchais justement. »