Saison Un

: Obscure Prophétie

Un problème tout feu tout flamme

Face à la nouveauté, Lotbrok avait été courageux contrairement à son pokémon, Maximus, qui avait tout bonnement refusé d’entrer dans l’agglomération. Froussard, le Cerfrousse ? Non, Bronko ne l’avait pas perçu comme ça, le daim était simplement … sauvage, peu enclin à faire des rencontres. Côtoyer les hommes n’était pas sa tasse de thé et plus que jamais, Lotbrok s’en rendait compte aujourd’hui. Se jugeant bien accompagné et, au demeurant, plutôt en sécurité à Bayette – après tout, que pouvait-il bien lui arriver en pleine ville, hein ? – le jeune homme n’avait pas insisté, laissant à l’entrée de la ville le Cerfrousse, qui ne l’avait pas attendu pour partir vaquer à ses occupations.  

Bayette était la première étape du voyage que Lotbrok entreprenait pour rejoindre le Parc Naturel, où l’attendait son oncle Brock, le chef des Gardiens. Cette aventure initiatrice avait pour mission de le forger et de permettre à ses pairs de juger de quel bois le garçon se chauffait. Si ce voyage avait pour but de l’évaluer, les risques que le garçon encouraient restaient … négligeables, car les routes qu’ils comptaient emprunter étaient sûres et, en théorie, sans trop de dangers. Alix avait profité de cette halte dans la ville bordant le Plateau Réfrigérant pour faire quelques emplettes et Lotbrok l’avait imité en achetant quelques baies (cela pouvait toujours servir après tout, non ?) et c’était là qu’ils avaient entendu parler du problème qui, depuis quelques jours maintenant, posait bien des soucis aux bayettois. Depuis quelque temps, un Caninos abandonné arpentait la station et pour l’heure, personne n’était encore parvenu à l’approcher et encore moins à le capturer, et cela n’aurait pas posé tant de problèmes si, par peur, le pokémon ne mettait pas le feu à tout va. Inespérée, Alix n’avait pas manqué de s’enquérir de cette mission, la jugeant plutôt simple pour l’apprenti qui l’accompagnait. Au pire ? La Chevroum du ranger et ses presque 100kg étaient toujours là pour dissuader les potentiels belliqueux, qui risquaient d’y réfléchir à deux fois avant de se frotter à cette grosse chèvre endémique de la région. Onze heure n’était pas encore passée lorsqu’ils entreprirent leur recherche et déjà, Bonko espérait que cela ne s’éterniserait pas, car le campagnard qu’il était s’imaginait avoir déjà vu tout ce qu’il y avait à voir à Bayette.

Un problème tout feu tout flamme

Bayette avait son charme, à sa manière. Si Lotbrok avait encore du mal à s’y faire (il fallait dire qu’il n’était pas non plus là depuis très longtemps), son regard cependant se portait davantage vers les montagnes encore enneigées du Plateau Réfrigérant, dont les monts disparaissaient derrière des nuages bas dans le ciel. Entassés par le vent contre la chaîne de montagnes, ils s’agglutinaient encore et encore, plombant le ciel comme jamais. Une tempête se préparait-elle ? Sans doute oui, et Lotbrok espérait ne plus être là lorsque cela tomberait ; déjà, le vent soufflait fort. A cette altitude, qu’est-ce qui l’attendait : de la pluie ? De la neige ? Le garçon n’était pas certain de vouloir le savoir.

La quête du Caninos s’avérait ardue, car en de telles conditions les pokémons feu sortaient rarement. S’ils étaient friands de soleil et de chaleur, le froid ne leur seyait guère et le jeune homme ne l’ignorait pas. Alors quoi, qu’allaient-il faire ? Devaient-ils attendre que le Caninos sorte, où devraient-ils le débusquer ? La question lui taraudait l’esprit, tandis que les deux rangers cheminaient à travers la station, les sens aux aguets.

« — Tu crois vraiment que le Caninos va sortir ? » questionna Lotbrok en jetant un énième regard autour de lui. Son ton trahissait son scepticisme « Et si on ne le trouve pas, qu’est-ce qu’on fait ? » poursuivit le jeune homme.

« — Allons, persévérons encore un peu avant de désespérer » lui répondit Alix « Ce Caninos est surement affamé et exténué, il faut le retrouver avant que quelqu’un de mal intentionné ne le fasse » déclara le ranger.

A ses côtés, Lila la Chevroum dressa subitement les oreilles, attirant immédiatement l’attention de son dresseur. L’objet de cette soudaine diversion ne resta pas bien longtemps secrète : certainement venu des montagnes, un Cabriolaine apparu, sautillant à tout-va autour du petit groupe et plus spécifiquement de Lila, centre de tout son intérêt. Lotbrok l’observa un moment … cette petite chèvre n’était pas farouche et cela ne manqua pas de l’étonner. N’avait-il pas entendu dire que les pokémons de la montagne étaient tout sauf amicaux ?

« — Je croyais les pokémons plus sauvages dans cette région » fit remarquer le jeune ranger, qui n’avait pas détourné son regard du Cabriolaine.

« — Ceux qui vivent proche de la station, comme ce Cabriolaine, sont habitués au contact de l’homme … mais pour ceux qui vivent sur le Plateau, c’est une autre paire de manche ! » assura Alix, qui s’amusait à voir le pokémon sauvage faire des cabrioles pour inciter la Chavroum au jeu.

Attendrie à n’en pas douter, Lila céda au manège et se mit à bondir elle aussi. Malgré sa masse, la chèvre géante faisait preuve d’une souplesse étonnante sur laquelle Lotbrok n’aurait jamais parié … ensembles, les caprins jouèrent un long moment avant que le Cabriolaine ne décide finalement de les laisser, retournant de là où il venait. La jeunesse du pokémon sauvage ne faisait aucun doute et les rangers le regardèrent disparaître derrière les bâtiments, les laissant de nouveau seuls avec leur mission.  

« — Focalisons-nous sur les endroits reculés » proposa Alix lorsque le calme revint « Avec ce temps, le Caninos ne s’est certainement pas aventuré dans les montagnes. Il doit se cacher quelque part ici »

Cela ne faisait aucun doute.

Un problème tout feu tout flamme

Loin d’être idiot, le projet d’Alix aurait pu porter ses fruits s’ils n’avaient pas été interrompus dans leur entreprise par un cri de triomphe (du moins cela y ressemblait-il). C’était une voix d’enfant et lorsque les deux rangers se précipitèrent dans sa direction pour voir ce qu’il en retournait, ils découvrirent une fillette accompagnée d’un grand Machopeur. Sous le bras, la créature tenait un autre pokémon et le cœur de Lotbrok fit un bond lorsqu’il le reconnu : un Caninos ! Etait-ce celui qu’ils recherchaient ? Sans doute. Il n’y avait qu’un pokémon feu domestique pour ainsi traîner par ce temps ; les sauvages, plus malins et débrouillards, ne se risquaient pas lorsque menaçait la tempête. Broko en était persuadé : c’était lui, cela ne pouvait être que lui ! A la vue de ce spectacle, les deux rangers se figèrent un instant. Des deux, s’approchant Alix fut le premier à intervenir.

« — Hey ! En voilà une belle prise ! » déclara-t-il en guise de salutation « Est-ce le petit Caninos qui sème le trouble dans la station ? » questionna le ranger.

Fier d’une expérience que Lotbrok n’avait pas, Alix avait l’intelligence d’être malin. Si la scène l’offusquait lui aussi, il était assez sage pour ne pas brusquer la fillette. Observateur, le ranger n’était pas sans savoir que cette petite fille n’était pas n’importe qui : ses beaux vêtements et sa balle luxueuse trahissaient ses origines et son rang dans la société. Non, elle n’était pas n’importe qui et les rangers devaient être prudents s’ils ne voulaient pas que leurs actions aient des répercutions trop importantes. Mais Lotbrok, lui, n’avait pas encore cette sagesse …

« — Ce pauvre Caninos est tout effrayé ! » déclara le jeune ranger, un peu fort « Est-ce que c’est comme ça qu’on capture un pokémon et qu’on se fait des amis à Bayette ? » demanda-t-il. Il fit une courte pause, se doutant bien de la réponse « Un pokémon doit être un partenaire, pas un esclave, et il ne doit pas obéir parce qu’il a peur, mais parce qu’il le veut. Si tu veux ce Caninos, tu dois gagner sa confiance, pas la prendre »

Sans doute avait-il un peu trop parlé … d’ailleurs, Alix lui jeta un regard. Venait-il de faire tomber son plan d’approche à l’eau ? Sans doute, mais ses paroles sortaient du cœur. Le sang du jeune homme n’avait fait qu’un tour à la vue de ce Caninos qui se débattait … oui, s’il avait eu le choix, sans doute le Caninos se serait-il enfui, non sans gratifier ses adversaires d’une morsure ou, pire encore, d’une bonne flambée. Et puis quoi, le tondre ? N’importe quoi ! Hélas, le canidé était pris au piège sous l’emprise du pokémon combat, bien trop fort et imposant pour lui, et cela Lotbrok ne pouvait laisser faire sans réagir. Malgré ça, le jeune ranger tenta de se radoucir, sous le regard attentif de son coéquipier et de Lila la Chevroum, qui observait tout cela du coin de l’œil.

« — Ce n’est pas bien de faire cela, ce Caninos sera malheureux si tu le forces à faire ce qu’il ne veut pas. Si tu veux qu’il soit heureux, du devrait lui laisser le droit de choisir » affirma le jeune homme, dont la voix s’était faite plus calme, moins passionnée, au demeurant plus amical.

« — Nous sommes des rangers, nous savons ce qui est bien pour les pokémons. Tu peux nous faire confiance » renchérit Alix, comme pour appuyer les paroles du jeune homme.

Et le Machopeur dans tout cela ? Qu’en pensait-il ? Appuyait-il sa maîtresse de son plein gré ou avait-il, tout comme le Caninos, été soumis par la contrainte ? Soudainement, dans le cœur de Lotbrok venait d’éclore une certaine animosité, qui depuis longtemps déjà avait germé du temps où il rencontrait ces riches bourgeois qui, en visite au Parc Naturel, se croyaient tout permis. En digne représentante de sa classe sociale, cette fillette ne semblait pas faire exception à la règle … mais peut-être n’était-il pas encore trop tard pour elle ? Peut-être que, par leur passage, les rangers pouvaient encore lui inculquer des notions qui manquaient tant à cette société, parmi elle le respect des autres, humains et pokémons. Encore fallait-il qu’elle l’accepte …

Un problème tout feu tout flamme

Aux paroles de la fillette, le sang de Lotbrok ne fit qu’un tour, encore une fois. De quoi ? Venait-elle vraiment de parler de dresseur ? Avait-elle le projet incroyable de dresser ce Caninos pour le faire combattre ? Cette fois, se mordant la lèvre Lotbrok rongea son frein, conscient qu’il en avait déjà assez fait comme ça. Il y avait pourtant, dans l’esprit du jeune homme, un dilemme avec lequel il ne parvenait pas à être en paix. D’un côté, le problème n’était-il pas réglé ? Si la bourgeoise emportait ce Caninos chez elle, sans doute le pokémon finirait-il par se faire à cette nouvelle vie. Après tout, certains pokémons de combat n’étaient-ils pas heureux ? Leur vie n’était pas parfaite aux yeux de Lotbrok, mais certains vivaient bien : ils mangeaient à leur faim, dormaient sous un toit et vivaient pour quelque chose … pourtant, malgré cela, malgré cette vérité que Lotbrok ne pouvait nier demeurait une petite voix au fond de son esprit, celle de la raison. Pouvait-il vraiment abandonner ce Canino a une vie de servitude, qui peut-être ne lui conviendrait pas ? Une vie de combats et de blessures loin, bien loin de la nature et des habitudes de ses ancêtres sauvages ? Demeurait également le risque que le Caninos, malheureux de cette nouvelle vie, s’échappe de nouveau, et alors tout serait à recommencer. Cette perspective minait le jeune homme, qui ne pouvait décemment pas laisser cela se faire. Que pensait Alix de tout ça ? Etait-il de son avis, ou se lavait-il les mains du sort du Caninos ? Parce que sa dernière intervention n’avait pas brillé par son efficacité, Lotbrok n’osait pas parler davantage. De toute manière, comment l’aurait-il pu tout en gardant son calme ? Impossible.

En voyant le Machopeur prendre la fillette sous son bras, Alix reprit la parole, tenta d’attirer l’attention de la bayettoise. Mieux valait ne pas la laisser rejoindre sa maison, au risque de devoir débattre avec les parents, certainement arrogants jusqu’au bout des ongles … les rangers auraient alors bien du mal à récupérer le Caninos, qu’Alix ne comptait visiblement pas abandonner.

« — Nous ne sommes pas des étrangers. Nous sommes des rangers, mon nom est Alix et je suis déjà venu ici … tes parents me connaissent déjà surement, d’ailleurs regarde, mon pokémon lui aussi vient d’ici. Elle s’appelle Lila, et elle est née dans ces montagnes » affirma-t-il en désignant le Plateau Réfrigérant. La Chevroum battit un instant de la queue, heureuse d’être soudainement le centre de l’attention « Mon ami ici présent est mon élève et vient de la Forêt Luxuriante. Tu connais le Parc Naturel ? Un jour il deviendra un ranger, comme moi. Il a encore beaucoup de choses à apprendre, pas comme toi ! »

Lotbrok, lui, brillait par son silence et sans doute était-ce mieux ainsi. La leçon d’aujourd’hui ne manquerait pas de lui rester en tête : il n’aimait pas les enfants, pas du tout du tout, pas du tout du tout. Attentif cependant aux paroles de son mentor, le jeune homme ne perdait pas une miette de la stratégie qu’il mettait en place pour amadouer la jeune fille.

« — Ce Caninos appartient déjà à quelqu’un. Nous avons été envoyés pour le retrouver et le ramener à sa maitresse, à qui il manque beaucoup » déclara Alix « Caninos a été séparé de sa maîtresse alors qu’ils visitaient le Plateau Réfrigérant. Ils ont rencontré une grosse bête et Caninos a pris peur, il s’est enfuis puis s’est perdu. Il est assez trouillard, ce n’est pas un bon combattant » raconta-t-il « Sa maîtresse le cherche depuis très longtemps, tu nous as bien aidé » assura le ranger.

Il y avait dans sa voix une assurance qui aurait fait douter n’importe quel septique. Parce qu’Alix semblait contrôler bien mieux que lui la situation (Lotbrok mettait ça sur le dos de l’expérience bien sûr), le jeune homme persévéra dans son silence, écoutant cette version de l’histoire qu’il découvrait lui aussi. C’était plutôt bien trouvé, Lotbrok devait bien l’avouer, et il espérait que la fillette croirait à cette histoire, au demeurant plutôt plausible.

« — En tout cas, tu pourras dire à tes parents que tu es fièrement venu en aide à deux rangers ! » poursuivit-t-il « Regarde, sa maitresse nous a même donner sa pokéball pour le ramener » déclara-t-il, comme pour confirmer ses dires.

D’un signe de tête, Alix avisa son acolyte, lui jeta un regard entendu … et alors, presque soudainement, Broko comprit enfin le plan du ranger, qui ne manquait pas d’une certaine audace. Puisque l’histoire était totalement fausse, ils n’avaient bien sûr aucunement la pokéball de ce Caninos, mais comment la fillette pouvait-elle le savoir ? La bayettoise n’avait aucune idée de l’allure de la soi-disant pokéball, et puis de toute manière les balls ne se ressemblaient-elles pas toutes ? Sans attendre, le jeune homme acquiesça, plongea sa main dans sa besace pour en sortir une pokéball.  

« — Oui, regarde, c’est celle-ci » renchérit le jeune homme.

De loin, Lotbrok la montra à la fillette, et pria en son for intérieur pour que cela termine de la convaincre. Bien des issues pouvaient désormais s’offrir à eux et quoi qu’il arriverait, les deux rangers avaient conscience que tout ne tiendrait pas à eux. Quand bien même la fillette accepterait-elle de libérer le Caninos – ce qui n’était pas gagné – encore fallait-t-il que ledit Caninos accepte de les suivre et, dans le pire des cas, d’entrer dans la pokéball sans trop faire des sienne. Pour l’amadouer, Lotbrok avait bien quelques baies achetées un peu plus tôt dans la matinée mais … cela suffirait-il à persuader le pokémon ? Rien n’était moins sûr. En attendant, le blizzard continuait de souffler à Bayette et les rangers se devaient de régler le problème assez rapidement … au risque de finir congeler avant la fin de la journée, ce qui n'était le projet ni de l'un, ni de l'autre, et encore moins de cette petite fille.

Un problème tout feu tout flamme

Lorsque Lotbrok comprit soudainement que la fillette avait déjà fait entrer le Caninos dans une pokéball, quelque chose en lui lui noua l’estomac. Du remord ? Sans doute, peut-être, car les paroles d’Alix avaient réussi à la convaincre de renoncer au chien abandonné et d’elle-même, la bayettoise avait rendu le pokémon, bien trop heureuse de faire ainsi une bonne action. Du regard, Lotbrok avisa son mentor, qui n’en menait pas large non plus … tout comme lui, le ranger avait pris la luxeball du Caninos pour celle du Machopeur et désormais sur le fait accomplis, Lotbrok se demandait bien ce qu’Alix comptait faire. Le jeune homme observa la petite fille s’éloigner, cachée dans les bras du pokémon combat, le cœur heureux d’être venu en aide à ces si gentils rangers ! Malgré tout, Lotbrok tentait de se persuader qu’ils avaient fait le bon choix : ce Caninos aurait été malheureux avec cette fillette … n’est-ce pas ? Sans doute ne le sauraient-ils jamais, puisque les rangers avaient arbitrairement mis un terme cette possibilité. Sa seule consolation était d’avoir conscience que la fillette n’en saurait jamais rien.

Lorsque la bayettoise eut disparu, Broko et Alix échangèrent un regard. Le jeune homme fut le premier à rompre le silence.

« — Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? » demanda-t-il, un peu hasardeux.

Oui, qu’étaient-ils censés faire ? Alix demeura silencieux, mais son regard se tourna vers le Caninos, encore pétrifié sur le dos de la Chevroum. Le pokémon leur était-il reconnaissant ? Difficile de savoir, puisque l’animal était tout bonnement tétanisé. Qu’allaient-ils bien pouvoir faire de lui ? La loi faisait de lui la propriété de cette gamine de Bayette, mais la loi avait-elle toujours guidée la voie des hommes ?

« — Voyons d’abord s’il se laisse approcher » répondit finalement Alix.

A toute vitesse, l’imagination de Lotbrok s’emballa. Le jeune homme s’imaginait déjà ramener le chien au quartier général des rangers où il serait sans doute accueilli à bras ouvert. Un peu naïvement, le jeune homme s’imaginait aussi que personne ne poserait de questions et sans doute n’avait-il pas tout à fait tort … et puis, au pire, ils pouvaient bien omettre certains détails, non ? Oui, cette perspective était plutôt pas mal et suffit à contenter l’apprenti ranger, dont la conscience avait été mise à mal par cette vilénie à laquelle il avait presque malgré lui (seulement presque) participé.

Ce projet aurait pu être envisageable, bien sûr, si le Caninos avait su être coopératif … c’était là, cependant, trop lui demander : à peine Alix eut-il approché la chèvre géante que l’animal, paniqué à l’idée d’être de nouveau malmené, grogna avant de descendre de sa monture pour ensuite se carapater à toute vitesse dans le blizzard, laissant derrière lui les rangers bredouilles. Plus que jamais, la tempête faisait rage et Bronko sentit le désespoir l’envahir. Récupérer ce maudit Caninos était leur mission, une mission qu’il se voyait mal abandonner maintenant qu’il avait promis à cette fillette qu’ils rapporteraient le pokémon à sa maîtresse fictive. Si la bourgeoise se rendait compte du subterfuge en tombant de nouveau sur le Caninos, quel message enverraient-ils ? Non, ils devaient récupérer le Caninos, mais la tâche lui parut plus que jamais impossible. Sans doute Alix sentit-il la baisse de motivation de son élève, car ce qu’il proposa échauffa un peu le cœur du jeune homme.

« — Faisons une pause le temps que le blizzard passe » déclara-t-il, non sans avoir au préalable pester en voyant le Caninos disparaître « Caninos a eu sa chance et il a décidé de ne pas la prendre, ne mettons pas davantage notre vie en danger plus longtemps. Nous ne sommes pas équipés pour combattre ce froid, attendons que le temps soit plus clément »

Lotbrok acquiesça, et sans un mot il se laissa guider par son mentor jusqu’à un petit restaurant où la chaleur du feu le réchauffa bien vite. Déjà, l’odeur des mets du midi attisaient ses papilles et le repas qu’ils commandèrent lui fit bien vite oublier le vent et le froid. Une part de lui s’inquiétait encore de savoir le Caninos dehors, et une autre se confortait dans l’idée qu’ils avaient fait tout ce qu’ils avaient pu. Si le chien avait été moins bête, il aurait laissé les deux rangers le conduire en lieu sûr, ou du moins à l’abri. Ressasser cette histoire ne servait à rien, bien que ce n’était là que partie remise.

De fil en aiguille, les pas des rangers les menèrent dans une zone encore non quadrillée et l’attention de Lotbrok fut happée par une maison en ruine, aux murs calcinés. Le regard du jeune homme s’y attarda, et il se demanda si c’était là l’œuvre du Caninos … ou bien d’autre chose. Trop curieux pour laisser la question sans réponse, Bronko interpella le ranger.

« — Regarde là-bas » déclara-t-il en désignant la maison en ruine « Est-ce qu’un Caninos aurait pu faire ça ? » demanda-t-il. Les dégâts étaient énormes et de la maison – qui avait plutôt été un manoir – ne restait plus que les fondations, ou presque.

« — Non, ce n’est pas un Caninos qui a fait cela » répondit le ranger, avare en explications.

« —Peut-être devrions-nous y jeter un œil … le Caninos s’est peut-être réfugié là ? » proposa Lotbrok.

Malgré sa jeunesse et son inexpérience, la réserve d’Alix concernant cette idée n’échappa pas à Lotbrok. Pourtant, finalement, le ranger acquiesça … ils pouvaient bien y jeter un œil, non ? Cela ne lui coûtait pas grand-chose, si ce n’était du courage, pour lui qui savait ce qui s’était passé là.

« — Très bien, mais offrons-nous un peu d’aide maintenant que le temps le permet » déclara Alix.

Et de sa poche, le ranger sortit une pokéball de laquelle s’échappa un oiseau au plumage de feu, qui très vite s’éleva haut dans le ciel. C’était Phénix le Flambusard, dernier membre de son équipe.