Saison Un

: Obscure Prophétie

Kalank brillait de mille éclats sous le soleil aveuglant de ce jour. L'astre immaculé trônait dans les cieux azurs, parfaitement dégagés en cette magnifique journée. Il était encore tôt pour une matinée, et pourtant le brouhaha de la capitale s'était vite levée, mêlant voix bruyantes et cris redondants de Goelise. Cette mélodie désaccordée mais chaleureuse montrait à quelle point la vie grouillait de toute part entre les bâtiments fiers de la ville. La mer méditation, quant à elle, caressait le port en quelques vagues délicates, et sa teinte de saphir n'avait rien à envier du ciel qui s'étendait au dessus de moi.
Ce jour, n'ayant pas de challenger à l'arène, j'avais décidé d'en profiter pour me rendre à Kalank. Déjà, parce que c'était la ville la plus proche ; mais aussi, parce que c'était une bonne excuse pour ne pas passer toute la journée dans mon antre sous-marine... À cette simple idée, un frisson glacial me parcouru l'échine. Berk ! Non, vraiment, il était hors de question que je passe ma journée à l'arène si personne ne m'y sollicitait. Et puis ici, à Kalank, pas besoin de se mouiller les chaussettes pour profiter du décor enchanteur offert par l'horizon bleuté.

Au coeur de cette immensité magique, je commençai à marcher ; mon pokémon favori marchant à mes côtés dans une démarche fugace. Face à mon regard d'Améthyste, Kalank se dessinait et semblait toujours avoir quelque chose à offrir à chaque nouveau pas. C'était quand même une chouette ville. Mais une grande ville : il fallait avouer que le coin n'était pas la capitale de Mistral pour rien. Je m'enquis de trouver le centre, dans l'espoir qu'un marché s'y tiendrait aujourd'hui ; mais à peine avais-je quitté le port que mes pieds m'avaient égaré au détour d'une rue prise trop tôt. Mon sens de l'orientation dérisoire n'était hélas plus à prouver... Conscient de ce défaut irrémédiable, je m'étais pourtant armé d'une carte, parmi les plus détaillées qu'il soit possible de trouver : mais rien n'y faisait. Elle ne m'avait pas plus été utile qune attaque flammèche à l'encontre d'un Tortank... Et puis, ce n'était certainement pas cet idiot de Bouletoke, qui m'emboitait niaisement le pas, qui pourrait m'aider ! D'ailleurs, il avait plutot  tendance à nous égarer plus encore dans ce genre de situation...

Suis la carte, suis la carte ! me répétai-je en fredonnant inlassablement, pour me rassurer. Mais l'effet n'avait rien de réellement efficace...

J'inspirai profondément. Je tentais de garder mon calme et le plus de contenance possible ; mais la seule pensée qu'on me reconnaisse et que l'on se moque de ce champion en carton perdu dans la capitale suffisait à faire s'empourprer mes joues de honte. Après un soupir expiré dans l'espoir de chasser cette crainte, je finis par replier la carte, resigné sur mon sort visiblement scellé depuis le départ. Perdu pour perdu, je n'avais plus qu'une seule espérance : tomber sur un resto ou un petit coin où grignoter avant midi. Normalement, ce n'est pas ce qu'il manquait à Kalank, des restos et des bars !

Je me retournais afin de m'adresser à mon compagnon Qulbutoke sensé me suivre, dans l'espoir de lui adresser quelques mots quant à notre situation... Quand je vis qu'il n'était évidemment plus derrière moi. J'aurais dû me douter que ce calme n'avait rien de normal avec lui ! Mon sang ne fit qu'un tour, et la panique commença à nouer ma gorge. Où est-ce qu'il était encore passé ce boulet ? Je rebroussai alors chemin, en vociférant son nom dans les rues, avec l'infime espérance qu'il s'était simplement arrêté devant quoi que ce soit qui ait pu retenir son attention et qu'il ne serait donc pas si loin. Pourquoi fallait-il que mon chouchou soit si stupide... Il n'était même pas là qu'il me désespérait.

Soudainement, une violente collision retentit non loin du champion. Une jeune femme supersonique s'était cognée contre un gros machin bleu. La vitesse qu'elle avait accumulée lui fit virevolter par-dessus l'obstacle avant de finalement se vautrer sur quelqu'un après quelques secondes passées à fendre l'air frais et marin de la capitale.

« Qu'est-ce que... »

Dora se releva d'un bond avant de contempler la jolie fille qu'elle avait renversée. Elle espérait ne pas l'avoir grièvement blessée. Elle lui tendit la main pour l'aider à se relever.

« Houlà... Désolée ! Tout va bien ? »

Un rire fort et franc retentit à son tour. Désagréable et stupide pour certains, hilarant pour d'autres, ce rire pour le moins cocasse s'avérait emblématique d'Escanor, le Tournegrin fort singulier de la Bricot. Il venait de rejoindre sa dresseuse, en compagnie du reste de la troupe : Sai, Sokka puis finalement Rogera. Cette dernière, dont le visage serait généralement jugé hideux par le commun des mortels, était d'ailleurs nommée en hommage à un botaniste dont elle était totalement fan. Oui, Dora aimait les plantes, toutes les plantes, elle ne pouvait ainsi qu'adorer les botanistes ou encore les fleuristes. Quant à Yam, il ne pouvait pas se déplacer sur la terre ferme et demeurait donc paisiblement dans sa Poké Ball.

Par le fabuleux pouvoir des coïncidences fort pratiques pour le scénario, ce fut Sokka l'Axoloto qui s'approcha avec sa bouche formant naturellement un sourire et ses petits yeux reflétant le néant. Il ne prononçait guère le moindre cri, et se contentait de s'approcher continuellement de la demoiselle inconnue sans la moindre once d'agressivité. Sokka est gentil et cool, il n'y avait donc rien à craindre, voyez-vous. Il ne manquerait plus que la nouvelle championne du type Eau - que Dora reconnut aussitôt - soit hydrophobe. CE SERAIT QUAND MÊME LE COMBLE, N'EST-IL PAS ???

« Tiens donc, Sokka vous aime bien ! C'est cool ça, lui qui est trop mignon et serviable ! »

D'un grand sourire innocent, Dora ne se doutait aucunement de ce qui allait se produire. Sokka non plus, il voulait juste saluer et suivre gentiment la fille aux airs ÉTRANGEMENT masculins. L'observer, faire connaissance sans lui dire un mot, rendre service... Autrement dit stalker pour devenir de supers amis, la méthode classique quoi. Comment ça "non" ?

Tout était allé très vite.
Un bruit sourd avait retentit. Puis une fille a volé. Elle m'a percuté aussi. Pendant un instant, j'avais cru que qu'elle était en vélo tellement elle était rapide. L'inconnue avait etait tout aussi fulgurante pour s'écraser que pour se relever : difficile d'y comprendre quelque chose honnêtement... Mais au moins, le teuc bleu qu'elle s'était pris, bah c'était mon boulet national : je venais de retrouver mon chouchou de Qulbutoke !

Mon assaillante, plantée sur ses deux pieds, était authentique et gentille. Ses quelques paroles se voulaient franches mais douces, et elle tendit la main pour m'aider à me relever. Je la lui saisis et épousseta mon ensemble tout neuf en la remerciant d'un hochement de tête et d'un sourire sincère. Bientôt, quelques pokémons la rejoignirent -dont un tournegrain au rire plutot particulier...

Une goutte de sueur froide glissa le long de ma nuque en voyant qu'une bonne moitié de l'équipe de cette demoiselle énergique était constituée de pokemons Eau.

Sokka? Qui est Sokka? pensais-je pour moi-même, en réponse à sa dernière exclamation. Je n'avais pas osé poser la question à voix haute, car celle-ci aurait pu être jugée idiote.
Hélas, je n'eus l'explication que trop tard, et à mes dépends ! Inquiet aussi pour l'état de mes chaussures à talons préférées, mon regard se baissa vers mes pieds. C'est là que je vis l'affreuse créature répondant au nom de Sokka. Évidemment, il fallait que l'un de ses pokemons EAU ait des vues sur moi ! Un axoloto en plus ! Un axoloto trop flippant même ! Il avait un sourire monstrueux et démoniaque, et un regard lointain qui devait certainement se nourir des âmes de ses victimes. Ce petit être bleu aux cornes roses n'arborait pas de bras, et avançait vers moi, lentement, mais déterminé, comme un zombie affamé. Gentil ? Il devait sentir ma peur et vouloir me torturer avec quelques Pistolet-a-o , oui ! Voir pire, peut-être que cet infâme créature avait prévu de me dévorer pour son ptit déjeuner ! Je suis peut-être beau, mais de là à être AUSSI appétissant j'aurais jamais cru. Je ne ressemblais quand même pas à un casse-croûte relisant, si?
Je fis un pas en arrière face au monstre qui ne me lâchait pas des yeux, restant sur mes gardes et tentant de rester le plus contenancé possible.

"Je... Euh, Comme il est beau ! Il a l'air... très... Gentil? Mais voyez-vous, mon Qulbutoke est... euh, très jaloux ! Il devrait éviter de s'approcher de trop, ça pourrait être dangereux pour ce pauvre petit ! "

Un bien beau mensonge, peu crédible à vrai dire. Mes jambes tramblaient comme une feuille au vent, et me menaçait de se dérober. Ma voix grave, qui était si calme normalement, trahissait un stress certain. Je cherchais alors à changer de sujet, tout en reculant doucement jusqu'à Bouletoke, à pas de velours.

"Vous... Vous vous appelez comment déjà ?"