Saison Un

: Obscure Prophétie

En constatant l’échec bien intentionné d’Atlas, Alphonse soupira sans lui en vouloir. Il n’y avait là que des haricots, un troisième paquet de spaghettis et un sac de baies à déballer. Afin de ne pas perdre courage, Alphonse décida qu’il ouvrirait le sac par la suite. Monsieur Bricot décida de lui laisser carte blanche pour continuer et terminer la cuisine. Bien qu’à moitié aveugle, a fortiori douloureusement, Alphonse put compter sur ses amis Pokémon pour endurer cette purge infernale que devenait cette tartiflette à ses yeux. Il prit quelques grandes inspirations et expirations pour évacuer un peu de nervosité. Il se devait de simplifier sa perception de la situation afin de ne pas vivre cette tâche comme une corvée absolue. Lui qui s’inscrivit initialement pour aider Sally et par plaisir de faire une activité en présence amicale, le voici qui jonglait désormais avec les facteurs de sa malchance ! Il eut raison d’arrêter le petit Atlas dans sa collecte d’aliments : celui-ci aurait pu empirer les choses.

Alphonse, au vu des haricots ajoutés, préféra les joindre à la salade. Le poireau n’irait donc plus dans celui-ci : mieux valait optimiser la tartiflette. Alphonse se dépêcha de préparer les haricots. Pendant ce temps, la première et grande fournée de pâtes se révéla prête. Il fit signe à Méline de les vider dans une grande passoire avant de refaire bouillir de l’eau dans le même faitout. Par la suite, Alphonse éminça le poireau mais en conserva quelques cubes pour agrémenter la salade. Une fois les patates et Froussardines prêtes, il commença à assembler les différents ingrédients dont également la sauce curry afin de commencer à former la tartiflette. Ceci fait, le jeune homme commença à faire revenir la croûte du pain de mie, comme le suggérait Monsieur Bricot. Il y déposa ensuite le jaune d'oeuf puis inséra quelques spaghettis tels qu'évoqués dans son idée précédente. À défaut d'être bon, le résultat surprendrait le jury.

Alphonse se rappela alors qu'il avait oublié d'ouvrir le sac de baies. Afin de continuer, il devait s'assurer de n'oublier aucun ingrédient une bonne fois pour toutes et il était justement temps de vérifier une dernière fois l'ensemble des baies.

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'Dé de baie' :

Alphonse ne sut comment réagir en découvrant une baie Figuy dans le sac. Elle était épicée, ce qui maintenait la cohérence du plat, mais empirait en parallèle cet excès. Or, dans la mesure où elle fut moins épicée, il décida de ne pas les joindre à l’accompagnement. Alphonse, souffrant encore aux yeux, éprouvait une grande difficulté à estimer la cohérence chronologique de la préparation du repas afin de tout servir à la bonne température.

L’eau du faitout bouillit à nouveau : Méline gagna un tour à son ami humain en y mettant les derniers spaghettis. Pendant ce temps, Alphonse garnit la tartiflette avec la mie inutilisée du pain. La baie Ratam fut émincée et ratatinée comme il fallut pour la disséminer avec homogénéité dans le plat. S’y joignit alors le jaune d’œuf comme l’avait recommandé Monsieur Bricot dans la même réponse. Ainsi, il n’y aurait plus qu’à tout recouvrir avec la croûte. Le jeune homme ressentit une impression d’y voir plus clair.

Le poireau émincé et la baie Figuy attendraient que la tartiflette soit prête. Rassurez-vous, Alphonse savait ce qu’il comptait faire. Il comptait découper la baie puis assaisonner la surface de la tartiflette avec celle-ci et le poireau. En attendant, il mit la tartiflette au four pour consolider ensemble. Ignis et Atlas se chargèrent de la surveiller attentivement pour qu’elle ne crame pas.

Il en profita pour nettoyer la poêle ayant servi à faire dorer la croûte du pain de mie. Vint alors le moment de se concentrer sur la salade, qui refroidissait déjà. Alphonse, rassembla attentivement les autres baies, quelques cubes de poireau et les fameux haricots blancs entre temps prêts. Il mélangea ensuite longuement le tout afin de bien tout répartir dans les spaghettis de la façon la plus diversifiée possible. Il paniqua alors : il avait oublié les Trompignons ! Fort heureusement, ceux-ci prenaient au moins une bonne demi-heure pour bien cuire. Ils se révélèrent donc tout à fait corrects au moment de vider la casserole. Il ajouta alors les Trompignons à l’ensemble. Déjà bien refroidi, l’insertion de ceux-ci produisit deux effets bénéfiques. Le premier fut de refroidir plus vite les Trompignons. Le second fut de temporiser le froid de la salade pour ne pas non plus assécher les spaghettis, grâce à la chaleur libérée à l’intérieur de ce méli-mélo.


Tiens, le jury revient vers nous ? J'ai peur...

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'Chance' : 62

Le moment de vérité arriva enfin. Alphonse terminerait enfin cette purge. Il pourrait enfin s’adonner à libérer ses malheureux yeux. Il pourrait enfin retourner à son stand et visiter ceux des autres avant que le salon ne se clôture. S’il avait su que ce concours serait aussi chronophage, il se serait probablement abstenu d’y ajouter sa propre galère. Paradoxalement, il ne parvint pas à regretter son inscription, en ce que cette expérience l’avait endurci. Il fallait bien se forger avec de mauvais quarts d’heure dans la vie, même si Alphonse commençait à avoir l’impression d’enchaîner lesdits mauvais quarts d’heure. La salade fut prête, et la tartiflette parut enfin au point. Le terme enfin serait enfin abandonné à la clôture de cette phase finale.

Alphonse prit l’émincé de poireau et le fit revenir à la poêle. Faisant en parallèle chauffer la baie Figuy à proximité de la flamme d’Ignis, Alphonse parsema la tartiflette toute chaude dudit émincé. Il put ensuite déposer délicatement des morceaux de la baie Figuy de sorte à former un cercle. Celui-ci fut approximativement situé aux deux tiers du rayon de la surface de la tartiflette, en partant de son centre. Alphonse ne savait aucunement s’il s’était adroitement débrouillé ou non. Dénué de notion en cuisine même ordinaire, il n’aurait su avoir connaissance des grands codes de la gastronomie régionale. Il espéra de tout son cœur ne pas trop se faire humilier en public par le jury. Ceci fait, il espéra surtout ne pas avoir à goûter cette horreur malgré son goût prononcé pour les aliments épicés.

Au moins, j’aurai TECHNIQUEMENT progressé en cuisine…

Afin de compléter le plat une bonne fois pour toutes, Alphonse sortit une très grande assiette. Il ne conçut même pas l’existence d’une si grande assiette auparavant, mais ne s’en plaignit aucunement. Il servit alors la tartiflette et la salade comme il l’imaginait. Toutefois, il y avait bien trop de « terre » par rapport à la « mer » pour reproduire la côte. Déjà très maladroit, Alphonse ne put de toute façon pas compter sur ses talents inexistants de cartographe pour en reproduire la forme de tête. Fort heureusement, une autre idée lui vint à l’esprit et sauva son plat avant qu’il ne soit trop tard : former un lac. En effet, la tartiflette serait au centre de l’assiette, entre-temps rincée et essuyer à cause d’un peu de sauce laissée par la salade de pâtes. Cette dernière serait ensuite entièrement servie autour, avec tantôt des plaines, tantôt des zones plus plates, parfois même des collines. En effet, le jeune homme présumait que le jury percevait sans doute la cuisine comme un art, pouvant ainsi légitimer ses choix picturaux. Ce n’était pas de la maladresse doublée de flemmardise, mais un choix artistique.


C’est quand même vachement pratique, l’art contemporain.

Alphonse eut presque honte d'émettre sciemment un sarcasme aussi facile, et de si mauvais goût – a fortiori sur un art incompris du plus grand nombre (lui-même inclus). Il ne put toutefois s'empêcher de sourire en raison d'un humour de qualité contestable. Quoi qu'il en fût, il déclara à Monsieur Bricot que leur tartiflette était prête. Le jeune homme se montra sincèrement reconnaissant avec le Champion.



Certes, l’emploi des Froussardines en substitut de la viande parut effectivement difficile à éviter. Néanmoins, l’idée de remplacer les autres ingrédients habituels par la sauce curry ou la croûte du pain de mie échappèrent à Alphonse. Heureusement que Monsieur Bricot était là malgré certaines méthodes particulières – comme le fameux crachat sur les oignons…

Libéréééééé, délivréééééé, je ne cuisinerai plus jamaiiiiiis !

...Sauf les multiples fois où il mangerait dans son logement avec ses Pokémon. Quelle triste corvée quotidienne pour un jeune homme si maladroit et procrastinateur !