Saison Un

: Obscure Prophétie

C’était moins une… A croire que les cavaliers avaient décidé de suivre la trace de Roger. Fricke, puis Cochignon… Peut-être n’était-ce pas une bonne idée de retourner dans sa ville natale, là où se trouvait sa grand-mère. Pourtant, le jeune homme n’avait pas d’autre choix de lui rendre visite, pour s’assurer que tout allait du côté de la vieille dame.

Heureusement, Maminette était une battante. La seule chose qu’elle avait trouvé de mieux à faire en voyant son petit-fils était de le gronder. Elle se faisait beaucoup de soucis pour lui, et son frère. Ce dernier allait bien également. Il était passé quelques jours avant lui apporter des vivres. En apprenant la nouvelle, Roger sentit un poids s’envoler dans sa poitrine. Il était toujours inquiet mais au moins, il savait que sa famille proche était épargnée… pour le moment. Lukas était déjà reparti, sous les ordres de Maminette. La vieille femme ne voulait pas que les frères restent trop longtemps sur place, les cavaliers voyageant de ville en ville.

- Et toi ? avait demandé Roger d’un froncement de sourcil. Hors de question que tu restes seule ici.
- Non, il faut quelqu’un pour veiller sur Violette.

Violette la Delcatty, compagne fidèle de Maminette et mère d’Ambroise. Le félin mauve n’avait pas échappé à la malédiction. Pas de signes d’agressivité venant de lui, il se contentait de rester cacher sous le lit dans la chambre de la vieille dame. La grand-mère de Roger laissait donc le pokémon dans la pièce mais venait souvent lui rendre visite pour lui apporter à manger et nettoyer la pièce. En attendant, Maminette avait décidé d’établir ses appartements dans la chambre des deux frères. Bref, la situation aurait pu être pire.

- Je suis persuadée que si je continue à prendre soin de Violette, elle retrouvera la raison. Ambroise aussi reviendra, oui, avait-elle dit, la voix emplie de douceur et d’espoir.

Les mâchoires de Roger se crispèrent. Il n’y avait qu’avec sa grand-mère qu’il savait tenir sa langue… En vérité, il n’était pas persuadé que des petites attentions, aussi bonnes soient-elles, puissent faire revenir les pokémons à leur état habituel. Néanmoins, au vu de la situation, il préférait laisser sa grand-mère croire ce genre de chose. Si cela mettait du baume au cœur de Maminette, cela convenait à Roger.

- De toute façon, je suis trop vieille pour t’accompagner. Je ne ferais que te ralentir.

Cette fois-ci, elle s’était montrée plus ferme. Le scientifique soupira. Il connaissait sa grand-mère, têtue comme un Bourrinos. Pour changer de sujet, le botaniste lui rapporta ensuite la conversation qu’il avait eu avec l’historienne de Cochignon et l’idée de ressembler plusieurs d’informations après cette visite.

- Oui, raison de plus pour que tu ne restes pas une nuit de plus ici. Va chercher des gens pour t’accompagner. Tu seras plus utile en voyageant qu’en restant sur place.

C’est ainsi que Roger se retrouva assis dans une auberge de Frîme. C’était bien beau de vouloir rencontrer du monde, encore fallait-il convaincre des inconnus de se joindre à lui. Le scientifique était d’un naturel sociable, ce n’était pas la peur du ridicule qui allait l’arrêter… mais la situation était un plus délicate que jamais. Qui serait assez fou pour partir sur la route pendant que quatre mystérieux cavaliers détruisaient tout sur leur passage ?

Voilà qu’il reprenait une mauvaise habitude, qu’il pensait avoir enterrée. Un cendrier devant lui, il écrasait sa première cigarette pour en reprendre une deuxième. S’il savait que repartir était le meilleur choix, il se sentait toujours autant coupable de laisser seule la femme qui l’avait élevée.

C’était terriblement impoli, pourtant Roger ne put s’empêcher d’écouter la conversation des deux jeunes filles qui se trouvaient à la table juste à côté. Dès qu’elles mentionnèrent le musée de Cochignon, le scientifique sut qu’il avait trouvé des personnes intéressées et intéressantes. Il devait essayer de trouver un moyen de s’incruster dans la conversation, sans passer pour un type louche… La tension était devenue tellement palpable entre les habitants de Mistral que la moindre étincelle provoquait une explosion. De plus, il manquait quelques heures de sommeil à Roger et cela se voyait clairement sur son visage.

Une des demoiselles se fit particulièrement remarquer, à croire qu’elle fit exprès de monter la voix. Quelques personnes s’étaient déjà retournées pour l’observer. Roger se redressa légèrement de sa chaise, écoutant attentivement ce que cette inconnue avait dire. Elle rentra directement dans le vif du sujet en demandant des volontaires. Parfait. Au moins Roger n’avait plus à chercher pendant des heures pour trouver quelqu’un qui partageait son point de vue sur ce chaos ambiant. En plus, elle avait l’air d’avoir un sacré caractère. Doublement parfait. Vu la situation actuelle, il valait mieux ne pas tomber.

Néanmoins, Roger ne se manifesta pas directement. Il préféra laisser la tension retomber quelques secondes. Quand la taverne reprit son ambiance habituelle, le botaniste en profitant pour tourner sa chaise en direction de la table où étaient assises les deux jeunes filles.

- Si cela peut vous éviter le trajet, je suis déjà allé à Cochignon… et, de toute façon, je ne vous conseillerais pas d’y vous rendre. Roger baissa la voix pour éviter que quelqu’un d’autre ne se mêle à la conversation, Je me suis rendu au musée et en sortant, c’était la panique totale en ville… Je suppose que c’était l’œuvre d’un de ces cavaliers.

A cette pensée, le jeune homme reprit une nouvelle cigarette. Il avait probablement échappé de justesse à la mort, un frisson lui parcourra l’échine. Il devait admettre qu’il se sentait bien faible face à ce genre d’individu dangereux. Néanmoins, l’idée de rester les bras croisés l’insupportait. Si personne ne faisait rien, la région serait bientôt rayée de la carte…

- Le danger est malheureusement réel et je suis totalement d’accord avec vous. Si on ne fait rien… Le scientifique laissa sa phrase en suspend puis se secoua la tête. Mieux vaut ne pas y penser.

Décidé, Roger tira sa chaise et prit la tasse de café qui se trouvait devant lui pour se joindre finalement à la table.

- Au fait, je m’appelle Roger. Si vous voulez bien de moi pour l’expédition je suis partant mais sachez que je suis simplement botaniste et mon seul compagnon de route est un Flabébé.

Le scientifique émit un petit rire, se moquant de lui-même. Il fallait l’avouer, ce n’était pas lui qui ferait le poids face à ces mystérieuses entité chaotiques.

- Enfin vous me direz que pour le moment, ce n’est certainement pas les pokémons qui vont nous prêter main forte.

Un problème parmi tant d’autres… Pourtant les cavaliers semblaient devenir la priorité première, le reste ne semblait plus avoir d’importance.

Roger fut satisfait de savoir que sa présence était appréciée, ou du moins acceptée. L’une de ces demoiselles se prénommait Vivia et la deuxième avait probablement oubliée de se présenter, prise par la conversation qui se déroulait entre eux.

Vivia souleva le problème de la malédiction… Arf, c’était donc ça que Roger avait oublié en partant du musée. Il aurait également dû demander si dans l’Histoire de Mistral, c’était la première fois ou non que les pokémons changeaient de comportement. Tant pis, il ne pouvait se permettre de faire marche à arrière… pas avec un cavalier aux trousses. La proposition de la jeune fille aux cheveux longs rejoignit l’objectif principal de Roger. C’était le moment de partager ce que l’historienne lui avait raconté au musée de Cochignon


C’était toutes les informations que possédaient Roger. C’était peu mais elles avaient au moins le mérite le guider jusqu’à sa prochaine destination. Il espérait démêler le réel de l’irréel.

- Pardon, je ne devrais même pas fumer, fit Roger d’un air désolé en voyant Vivia s’étouffer avec la fumée de cigarette.

Il écrase celle-ci entièrement dans le cendrier puis joignit ses mains et les posa sur la table pour ne plus être tenté d’aller chercher une énième cigarette. De toute manière, il avait mieux à faire que se bousiller la santé. Ecouter les deux jeunes filles permit au scientifique de concentrer son attention ailleurs que sur le paquet qui se trouvait dans sa poche.

- Hum… le jardin et la tour moussue. Qui ne tente rien n’a rien, admit-il.

Etant originaire de Frime, Roger avait pris l’habitude de se balader à ces endroits. D’un côté, il les connaissait par cœur mais d’un autre, il avait tellement l’habitude de s’y rendre que certains détails devaient lui échapper.

- Pour le cimetière, en plus de la potentielle dangerosité, ça nous ferait faire un détour. Pas sûr que cela soit très judicieux, pensa le scientifique à voix haute.

Si Vivia semblait perplexe, son amie commençait peu à peu paniquer, perdue parmi toutes ces idées. A croire qu’elle portait à elle seule les malheurs de ce monde. C’était dans ces moments qu’il valait mieux ne pas perdre la face et se soutenir les uns les autres.

- Inspire un bon coup… puis souffle… On va élaborer un trajet qui va nous mener aux plus de points possibles le plus rapidement, d’accord ? dit doucement le botaniste.

Roger prit un moment pour réfléchir. Effectivement, il n’y avait pas qu’une seule source d’eau et les visiter une à une risquait de les ralentir considérablement. En ce qui concernait la Source des Origines, le problème restait le même. Aucune des trois jeunes personnes assises à cette table n’était armée pour affronter ce lieu.

- Vu qu’on est déjà sur place, autant aller voir le jardin et la tour. Ensuite, on peut se rendre à Roc-Amandour, et ça tombe bien puisque que Pignouse se trouve sur la route. En ce qui concerne les sources, on aura le temps d’y réfléchir d’ici là. Qui sait, on trouvera peut-être des indices en chemin qui vont nous renvoyer dans une toute autre direction.

Désormais, Roger avait la sensation de mieux se repérer dans le flou de la situation. Certes, le brouillard était toujours présent mais, désormais, il avait une lanterne pour guider ses pas.