Saison Un

: Obscure Prophétie

Remède aux mots



Par monts et par vaux, le Bourrinos galopait à en perdre haleine. Les brides abattues et sans jamais s'arrêter. Il fallait retrouver Famine et au plus vite ! Le sauver. Lui aussi mais aussi tous les autres. Réparer toutes les bêtises qu'ils avaient fait. Mais pouvaient-ils vraiment y arriver ? Tant de morts et de traumatismes. Mistral avait été blessée grièvement. Jamais on ne le leur accorderait le pardon, mais plus encore jamais ils ne se pardonneraient eux-même.

Au moins, il essayerait de sauver ce qui pourrait encore l'être et pour cela, il pouvait compter sur l'aide de madame Lizbeth. Accrochée derrière lui sur le dos de Svadilfari, elle était un autre poids plume qui nullement ne gênait l'endurance de la monture. Mais ce qui inquiétait le plus jeune des deux scientifiques était sa rapidité. De tous les chevaux des cavaliers, il était sans conteste le plus lent et le temps leur était compté. Arriveraient-ils à temps ?

L'espace d'un instant, il voulu demander au Metamorph encore au creux de son bras de prendre le relais mais se ravisa... Pas la peine d'épuiser un peu plus Miroir, après l'attaque qu'il avait reçu de plein fouet il allait se passer un certain temps avant qu'il ne recouvre toutes ses forces. Dommage car un Galopa de Galar aurait été un destrier bien plus véloce. Au moins le temps du voyage allait servir à pouvoir s'expliquer car il savait que son aînée avait une multitude de questions. Cela n'excuserait jamais les actes qu'il avait commis mais si cela pouvait aider à comprendre un peu mieux la situation alors il ferait son maximum.

Craintivement, il fini par tourner son regard par dessus son épaule pour faire comprendre à la maire qu'elle avait toute son attention. Heureusement qu'il portait son masque car il pouvait au moins se cacher derrière. Couard qu'il était, il avait besoin d'un tel artifice pour oser affronter le regard qu'elle pouvait bien lui porter en cet instant. Il verrait-il de la déception ? De la tristesse ? De l'incompréhension ? De la colère ? Ou bien un mélange de tout cela ? Elle en avait le droit après tout.

Il commença à ouvrir sa bouche quand tout à coup une vive lumière traversa les ténèbres qui c'étaient installées sur Mistral et même de là où ils étaient, le brunet pouvait voir la cause : un Pitrouille Gigamax au dessus du château de Carcakrok. La gorge se noua alors que celles des défunts se faisaient entendre. Dans un dernier chant d'adieu, ils crient leurs « au revoir » à ce monde.

Vint alors un souffle qu'ils ressentent jusqu'au plus profond de leur être et il sent le lien avec Svadilfari devenir plus puissant. Babum. C'était l'écho de son cœur dans sa cage thoracique. Babum. Mais ce n'était pas que le sien. La monture comme son cavalier ne faisaient plus qu'un et cette fois sans cette obscurité qui avait noué leurs deux cœurs.

Babum.

Une larme roula le long de sa joue. Un tel sacrifice. Un acte de bonté et d'altruisme en ces temps. Cela redonnait espoir. Espoir en des choses auxquelles il avait cessé de croire. Oui. Il y avait encore de l'espoir tant que des cœurs aussi braves continueraient de battre. De sauver le monde à l'aide de leur volonté. Cela ne fit que renforcer la sienne : même s'il était désormais hait de tous, il n'abandonnerait pas sa quête de rédemption. Il prit enfin la parole.

« - Il... il faut aider mes amis à sortir de l'emprise des... des cavaliers ! Cette obscurité... elle... elle a grandit en nous jusqu'à prendre le contrôle de notre corps... c'était comme si ces ténèbres réalisaient les vœux en nous... mais à quel prix... je... je sais que cela n'excusera jamais ce... ce qu'on a fait... mais... mais je ne veux pas voir mes amis mourir ! Il... il faut les aider... je... je vous en supplie madame Lizbeth... prêtez-moi... votre force... et... et votre soutien... »

Remède aux mots



À la question de la blonde, le cœur du jeune scientifique se serra. Eux, faire partie de l'Ordre Noir ? Non ! Par tous les Pokémons, non ! Il arrêta quelques instants sa monture et se retourna face à celle qu'il considérait comme une guide. Malgré la lueur encore persistante de ses yeux, il y avait encore ce petit éclat pur de jadis, minuscule mais bien présent. Celui que l'enfant avait quand il avait commencé son aventure.

« - Non ! Non, non, non ! Notre groupe ne... ne fait pas partie de l'Ordre Noir ! Je... je vous le jure madame Lizbeth ! On... on voulait combattre tous les méchants de Mistral ! On... on voulait se déguiser en cavalier pour faire peur... rien de plus... afin de pousser le plus de monde à.... à un endroit et qu'on... qu'on dévoile tout ce qu'on savait ! On... on n'a jamais voulu... tout... tout... tout cela... »  

Ses dernières paroles avaient finies en sanglots étranglés par toute la culpabilité qui l'accablait. Tous ces morts, tout ce que Pestilence l'avait obligé à faire. Jamais il ne pourrait se le pardonner et rien que de repenser au carnage, il en avait des nausées. Tout ce sang. Toutes ces morts. Son cœur tambourinait dans sa cage thoracique tandis que sa tête tournait. Mais il fallait se ressaisir, sa collègue voulait des réponses et pour le moment, il était le seul à pouvoir les donner afin de sauver ses amis.

Par contre ce fut le seau d'eau froide. Celle qu'il considérait jusqu'alors comme sa collègue se révélait alors être la nouvelle maire. Il manqua de chuter devant toutes ces révélations. Non seulement il risquait d'entacher sa réputation en l'emmenant avec lui mais en plus il risquait de mettre en danger l'une des personnalités les plus importantes de la région. Une nouvelle bêtise de plus à mettre à son palmarès déjà bien rempli.

« - Je ne sais pas précisément quand... quand on a commencé à dévier de notre mission... que nos cœurs ont été corrompus... tout ce que je sais c'est... c'est que Doubly et Oz ont été... ont été les premiers touchés... »

Cette fois, les larmes coulaient de nouveau librement le long de ses joues. Il avait peur. Tellement peur. Ce masque qui le protégeait jusqu'alors du monde extérieur était devenu une gêne, il étouffait en dessous. C'est pourquoi il fini par le relever et faire tomber sa capuche dans le processus. Plus de mascarade, il était de nouveau l'enfant mis à nu.

« - J'ai cru que... que je pourrais les sauver... mais... mais j'ai échoué... une fois de plus... j'ai été inutile... et moi aussi je suis tombé dans le piège de ces murmures... nous avons été engloutis par des ténèbres... nos Pokémons et nous... et nous sommes devenus les vrais cavaliers... pas leurs répliques... peut-être parce que nous sommes trop restés dans le manoir ou que nous avons été touchés par une attaque ? »

Mais malgré le fait qu'il haïssait cette parti obscure de son être, il ne pouvait nier le fait que ce dernier avait permit de faire éclater au grand jour une bien sombre histoire. Les lueurs de ses yeux s'intensifièrent quelques instants avant qu'il ne se reprenne. Une main sur son front, il combattait cette rancœur qui avait fait tant nourri le Docteur. Car s'il avait réussi à le défaire, pour le moment il n'était toujours pas à l'abri que l'autre réapparaisse.

« - Quelques jours avant le Congrès scientifique... le... le Professeur Snappy et moi avions découvert l'existence du Pokérus-B... une forme hautement agressive et contagieuse de virus qui avait muté à partir du Pokérus mélangé à un taux anormalement élevés de spores contaminés de Spododos... Mais... il y a eu ces... ces deux scientifiques qui... qui m'ont chassé du... du laboratoire et nous ont fait taire le Professeur et moi... ils... ils avaient dit qu'ils... qu'ils en parleraient à la maire... mais... mais ils ont mentis !!! Ils ne voulaient pas sauver Bivouac ! Ils voulaient faire taire l'information... pour pas créer la panique ! Alors... alors qu'on était tous en train de mourir ! »  

Cette fois-ci, il avait presque crié tant tous cela lui pesait sur le cœur. Tout ce qu'il avait dû cacher jusque-là parce qu'il était constamment surveillé. Cela sortait enfin, comme un abcès qui se vidait enfin. Et plus il parlait, plus il avait envie de vomir. Ses craintes. Ses doutes. Tout était en train de se déverser tel un torrent.

« - Ils... ils ont même laissé le salon de l'agriculture avoir lieu à Bivouac... comme... comme s'ils voulaient empoisonner tout le monde délibérément ! C'est... c'est pas moi qui ai déversé le poison... ce... ce sont ceux qui ont tout cachés qui nous ont tous empoisonnés ! »

Depuis ses recherches au manoir, il savait qu'il y avait plusieurs complots mais ne pouvait rien dire. Cette trace de ce qui fut jadis un être humain carbonisé était là pour lui rappeler sans cesse que sa vie ne tenait qu'à un fil et que s'il osait parler, tout ce qu'il savait et lui-même disparaîtraient. Mais il sentait qu'il pouvait lui faire confiance à elle. À madame Lizbeth. Alors, il fit part de plus grosses inquiétudes.  

« - Étaient-ce seulement de vrais scientifiques ou... ou travaillaient-ils pour un groupe ? La Team Rocket ? La Notra ? L'Ordre Noir ? Un autre groupuscule plus dangereux ? Je... je n'en sais rien... mais... j'ai... j'ai si peur... »

Sa gorge se nouait une nouvelle fois mais pourtant au fond de lui une chaleur rayonna. La même qui l'avait aidé à sortir de l'emprise de Pestilence. Et son regard apeuré dévoilait pourtant une volonté et de la résignation.

« - Si... si je survis à tout cela alors... alors je consacrerai ma vie et toutes mes connaissances à... à éradiquer le Pokérus-B... j'en... j'en fais la promesse... madame Lizbeth... je... je vous le jure... même derrière les barreaux d'une... d'une prison... »

Oui, il ne se sentait plus digne de pouvoir vivre en liberté. Après tout le mal qu'il avait causé, le mieux serait qu'il finisse sa vie au fond d'un cachot. Dans les ténèbres qui lui faisaient tellement peur. Avec cette solitude qu'il craignait tellement. C'était un juste prix à payer pour pouvoir protéger ses amis. Oz. Véronica. Gabriel. Doubly. Il voulait tellement les sauver qu'il était prêt à en payer le prix fort !

Résigné, il demanda à sa monture de continuer sa course. Ils avaient perdu trop de temps avec cette pause. Mais au moins elle avait permit à la créature de reprendre son souffle. Un hennissement et la voilà parti en direction du lac du château, là où il sentait qu'il fallait qu'il aille.

Remède aux mots



Les grosses larmes avaient coulées le long de ses joues creusent et les pleurs de l'enfant avait résonné dans la ville. Si une personne n'avait pas vu de qui ils provenaient, sûrement aurait-elle pensé que c'était un autre orphelin apeuré par les événements tragiques qui laissait exploser sa peine. Il s'était senti tellement démuni dans ses bras. Lui qui avait une force meurtrière était devenu si faible devant cet élan de tendresse. Oh madame Lizbeth. Après le Professeur Snappy, c'était un scientifique comme elle qu'il aimerait un jour devenir.

Mais cet espoir serait à jamais anéanti car son chemin était pavé de sang et de cadavres mais surtout parce qu'il était un trouillard. Un pleutre qui s'était laissé engloutir par ses émotions négatives et ses doutes. Alors que l'air caressait de nouveau son visage au rythme du galop de Svadilfari, les sillons humides de ses pleurs s'étaient taris mais demeuraient. Il avait honte et par réflexe il utilisa de nouveau son masque pour se cacher du monde. Mistral n'avait pas besoin de voir un visage aussi immonde que le sien.

« - Non... non... mademoiselle Véronica n'est... n'est pas une sorcière... elle... elle s'est faite posséder lors du bal... Gabriel a dit que c'était quelque chose plus noir que noir... »

Pour des scientifiques, cette réponses pouvait laisser perplexe et même lui, s'il n'avait pas vécu aussi longtemps aux cotés de Gabriel au manoir ou encore passé un peu de temps avec Mister Hide, jamais il n'y aurait cru. Mais le fait était là, il y avait une histoire qui se tramait derrière tout ça,
encore plus sombre que ce qu'ils pouvaient craindre. Cela lui faisait peur. Tant de mensonges. Tant de mystères.

Et peut-être qu'il ne serait plus là pour aider à les résoudre. Mais au moins il avait donné des pistes à sa collègue, elle pourrait reprendre la flambeau de ses recherches. Il comprenait pourquoi le Docteur avait brûlé son journal. Pour les ralentir mais aussi pour le blesser un peu plus. Son journal. Le souhait de bonheur que lui avait légué sa maman. Détruit. Réduit en cendres. Il pourrait toujours en refaire un mais... mais il ne serait pas ce journal. Celui où elle avait laissé ces quelques mots à son intention.

Elle lui demandait d'être courageux. Comment pourrait-il le devenir lui qui n'avait jamais eu cette force en lui. Mais tout faire pour protéger ses amis... ça, ça c'était dans ses cordes. Il avait réussi à entrer dans un manoir hanté rempli de fantômes tous plus dangereux les uns que les autres tout ça dans le but de comprendre et aider un garçon. Il avait réussi à tenir tête à une puissante entité obscure pour protéger ses amies Alice et Sally. Il acquiesça de la tête mais sa voix se fit résignée.

« - Je... je ne mérite pas la liberté... ma... ma place est dans une prison... là... là où je ne pourrais plus jamais blesser personne... ma place est dans les ténèbres... alors il faut tout me mettre sur le dos pour pas qu'il leur arrive quelque chose... à... à mes amis... »  

Rien que de se savoir enfermé et seul dans le noir lui faisait peur mais il savait cette sanction amplement justifiée et si cela permettait à ses amis de s'en sortir alors il serait plus qu'heureux de payer pour tous. Le rôle de Healer était de les protéger après tout.

« - Ce... ce sont les pouvoirs de Gabriel... ils... ils lui permettent de voir des éléments du passé et... et du futur... et... il... il a vu qu'il y allait y avoir une... une catastrophe... à... à cause de méchants... alors... on... on voulait protéger Mistral des vilains et se faire entendre... les meurtres du... du manoir... le Pokérus-B... toutes ces choses que les gens essayent de cacher... on... on voulait dire ce qu'on avait trouvé... »  

Tout d'un coup, il prit un air inquiet. En dévoilant tout cela, il sentait comme s'il trahissait son ami. Il attrapa le bec de son masque et le força à s'enfoncer un peu plus sur son visage, comme s'il cherchait à se cacher complètement en même temps que sa honte.

« - S'il... s'il vous plaît... ne... ne dites à personne pour Gabriel ! Je... je ne veux pas qu'on ait peur de ses pouvoirs ou qu'on le traite comme un Rattata de laboratoire... il... il est mon ami et je veux le protéger ! Tout comme Oz ou Véronica ! Ce... ce sont de gentilles personnes qui... qui s'inquiètent vraiment pour tout le monde ! Ils... ils veulent faire le bien ! »

Remède aux mots



Tout en avançant, l'ancien cavalier de la Pestilence écoutait les questions de son aînée aussi bien que les précisions qu'elle lui apportait. Si certaines choses lui firent l'effet d'une claque, elle avait raison sur un point crucial : pendant trop longtemps beaucoup de choses avaient été laissées sous silence. Trop de mensonges. Trop de cachotteries. La belle Mistral campagnarde cachait décidément un jeu beaucoup trop sombre pour eux. À croire qu'ils allaient finir par en perdre la tête.

S'ils avaient avoué les pouvoirs de Gabriel, ce don qu'il avait, alors il aurait été la cible d'un roi mal conseillé. Avec de telles révélations, comment pouvait-il encore faire confiance aux adultes ? Eux qui n'avaient cesser de leur mentir et de les traiter comme s'ils n'étaient rien. Pourtant il avait vu plus de maturité en ses amis qu'en certains adultes. Avec toutes ces magouilles et ces mascarades, comment faire confiance ? Il était tellement fatigué. Mais les paroles le secouèrent aussi, telle une claque pour lui remettre les idées en place. Il y avait beaucoup d'adultes qui étaient méchants et manipulateurs, ignorants mêmes pour ne pas citer les paroles de ce « cher » Pestilence, mais il y avait aussi des personnes sur qui il pouvait compter. Bienveillantes et toujours prêtes à tendre la main.

« - On... on a voulu agir... de nous même parce que... parce que les adultes ne nous croyaient pas... ils... ils ne voulaient pas nous écouter... »

À ses paroles, il se souvint des craintes de son ami. « Peut-être que nous allons trop vite, peut-être qu'ils nous écouteraient. Nous sommes des enfants c'est vrai mais... », « Nan oublie...même toi ils ne t'ont pas écouté. Alors moi... ». Après tout, sans réelles preuves, qui pourraient les écouter ? Qui serait en mesure de les croire ? Ils n'étaient que des enfants à l'imagination trop débordante pour la plupart des gens. Des vilains garnements qui ne faisaient que des farces.

Et pourtant...

Elle le croyait. Lui, le petit menteur. Les yeux grands ouverts, il l'écoutait sans mot dire. Cette volonté. Cette soif de vérité et de justice qui coulait en elle, elle avait aussi ruisselé en lui autrefois. Impétueux et indomptable. Cela avait été aussi violent qu'un torrent mais petit à petit la glace l'avait emprisonné. Corrompu par l'obscurité de Pestilence en une envie de vengeance. Mais il restait de fins filets qui continuaient tout de même à serpenter en lui. Oui, il y avait toujours de l'espoir. Peut-être pas pour lui, mais pour Mistral.

Sans obscurité, il n'y avait point de lumière.

Et c'était dans ces ténèbres que ses rayonnements étaient plus impressionnants. Presque aveuglants. La détermination à faire avancer cette région et à la rendre meilleure. Voilà pourquoi elle avait été élue maire. Ce rôle lui allait tellement bien et il était prêt à la suivre. À brandir son étendard. Dans son cœur voilà que les eaux de la curiosité s'agitaient de nouveau et faisait craquer le barrage mental qui s'était érigé.

Alors, il releva finalement la tête. Oui, il avait fini de faire l'enfant. Il était prêt à parler pour qu'enfin toute la vérité éclate et ce, même si ce serait la dernière chose qu'il ferait en ce monde. Afin qu'enfin quelqu'un soit fier de lui.

« - Je... je ne cacherais plus rien... Je... je vous le promets... je... je veux aussi vous faire avancer dans la lumière... mais... mais est-ce que j'y ai encore le droit ? »

Caché derrière son masque, il la regardait, prêt à exécuter ses ordres. Il n'attendait plus qu'une chose : un mot d'elle.

Remède aux mots



Toujours en direction de Carcakrok, le cavalier et son alliée avançaient vers ce qui semblait déjà être le lieu du combat final. Pourtant il n'avait pas le cœur à se battre : tout ce qu'il voulait faire était de sauver ses amis mais avec ce qu'ils avaient fait... quatre enfants avaient suffit pour mettre toute la région à feu et à sang. Tout ce qu'il pouvait espérer était dans le meilleur des cas une vie derrière les barreaux. Il soupira, résigné.

« - Véronica a ce « don »... elle se fait facilement posséder par les esprits... et celui du bal en a profité pour en faire sa voix... elle... elle est innocente ! Elle... elle n'a jamais rien fait de mal... c'est... c'est juste l'amoureuse de Gabriel. »

Houla, il avait avoué un secret de son ami, pas certain qu'il ne lui pardonne mais une telle information ne pourrait jamais être perçue comme assez utile pour être utilisée. Cela le gênait grandement de devoir dévoiler leur vie à tous mais si cela permettait à la blonde de pouvoir préparer un réquisitoire en leur faveur, il acceptait volontiers de céder ce qu'il savait. Après tout, il le lui avait promis.

« - Pour ce qui est du... du manoir... comme nous le savons tous... il... il y a eu des meurtres... ce... ce n'était pas un incendie accidentel mais... mais bel et bien un coup d'état... on a clairement empêché la cloche de Vigneaux de sonner... on a empêché de porter secours à... à la famille royale... et... et les écrits sur cette nuit sont mensongers... tout ce qu'on a vu lors du bal était... était bien réel... j'ai enquêté au manoir et... et j'ai retrouvé le pauvre corps du pauvre garçon carbonisé... enfin... ce qu'il en restait... cela m'a fait un choc... de... de pouvoir enfin mettre un visage sur cette silhouette... L'Histoire de Mistral est... est fausse... et tout ceux qui ont enquêté dessus ont... ont fini très mal... c'est... c'est pour cela que j'ai eu peur de vous dévoiler tout cela madame Lizbeth... car maintenant que vous savez... vous... vous êtes en danger... »

Comme pour confirmer ses craintes, voilà que le Bourrinos s'ébroua et faisait transparaître l'inquiétude que son petit cavalier tentait vainement de dissimuler. Tous les livres étaient assujettis à l'approbation de la famille royale uniquement pour vérifier que rien de compromettant ne pourrait fuiter. C'était tout bonnement et simplement de la propagande.

« - Pour ce qui est de... de Gabriel... il... il a toujours été très mystérieux dans ses réponses... même... même avec moi... c'était comme si... comme s'il savait qu'un jour... j'aurais à dévoiler tout cela... il parlait toujours des méchants qu'il fallait combattre... que des ténèbres allaient venir... mais il semble qu'elles aient frappé plus... plus tôt que prévu... et nous les premiers... alors qu'on voulait les combattre... »

Son cœur se serra. Finalement, ils n'avaient fait qu'aider ces ténèbres qu'ils avaient vainement tenté d'arrêter. Le pauvre petit groupe de Donjon et Drattak avait perdu face au boss de fin et étaient désormais ses marionnettes. Quelle triste ironie.

« - Le... le mieux serait donc de lui poser la question... peut... peut-être qu'il se confiera un peu plus à vous qu'à moi... parce que... parce que j'ai juste l'impression qu'il a voulu me protéger... qu'ils... qu'ils ont tous voulu me protéger... »

De nouveau ses larmes coulèrent librement. Pathétique et inutile jusqu'au bout. C'était son rôle à lui de les soigner. De les protéger. Pas le contraire. Il n'avait été qu'un boulet tout du long. Si seulement ils avaient pu voir en lui autre chose qu'un pauvre être qu'il fallait à tout prix protéger alors peut-être que tout ceci ne se serait pas passé. Tout. Tout était de sa faute.

« - Pour... pour ce qui est de la maladie... il... il y a tellement à dire... trop compliqué pour le moment et... et nous avons pour le moment si peu de temps… de plus... Pestilence a fait exprès de... de brûler mon journal... le cadeau de maman... pour pas que vous tombiez dessus... mais... mais il ne pensais pas que... que je pourrais lui tenir tête... j'ai... j'ai toutes les formules dans... dans ma tête ! Il... il me faudra plusieurs jours pour tout réécrire mais... mais je sais que j'y arriverai... pour mes amis... et... et pour Mistral... Il... il faut juste savoir que beaucoup de gens étaient déjà contaminés bien avant le bal... le... le virus met quelques temps pour se déclarer... »

Il avait beau ne pas être maître de ses faits et gestes lorsque le journal fut mit dans la cheminée et brûla devant ses yeux, il en avait parfaitement tous les détails. Cette entité qui lui avait dit l'aider, Pestilence, était en fait une vilaine menteuse qui c'était servi de lui. Enfin de compte, tout comme madame Lizbeth, on ne faisait que se servir d'eux. À la différence que lui avait tout perdu.

Il avait déçu tout le monde.

« - Voilà... tout... tout ce que je sais... est-ce... est-ce suffisant pour... pour sauver mes amis ? Je... je vous en supplie madame Lizbeth ! Protégez-les ! C'est... c'est là ma dernière volonté... »