Saison Un

: Obscure Prophétie

Couenne fit les gros yeux en voyant le Pokémon d’Edwin viser son potentiel adversaire. Mais non mais non ! S’il attaque, l’autre risque de contre-attaquer, et elle finira trempée à son tour ! Dégoutée à l’idée de se faire salir plus encore que de se prendre une attaque perdue, la Gruikui s’éloigne de quelques pas à reculons, les oreilles basses. Et ce, jusqu’à se cogner contre la Voltali qui arrivait. Après avoir observé le sursaut paniqué de Couenne, la renarde électrique s’installe sur son postérieur et se contente d’observer, ignorant le regard pressant du Flingouste. Qu’il agisse, lui, s’il le souhaite. Pour sa part, elle protège le cochon. Ou disons qu’elle profite de sa présence pour rester dans son inaction déprimée.

Pour ma part, j’ai des étoiles dans les yeux en écoutant le super discours du shérif. Surtout quand il dit : "la loi c’est moi" ! C’est trop la classe ! Celui qui tentait de lui tenir tête blêmit de plus en plus à chaque nouvelle remarque, et ce, jusqu’à ce que je sois intégrée à la discussion.

— Oh oui, oui ! Comme ça, si y’a plus de vol c’est que c’était bien eux !

Bah quoi ? C’est pas comme ça que ça marche ? Le dresseur au Carapuce me dévisage d’un air complètement désemparé, presque terrifié. Ça s’entend à mon timbre que je suis sérieuse, moi ! Autant pour l’idée que pour la conclusion excessive que j’en fais (surtout que, y’en a eu des vols au final ou pas ? Aucune idée.)
Je crois qu’il va se faire dessus, il commence à trembler. Même son Pokémon commence à paniquer, balançant des « Cara, cara » inquiets à son intention pour comprendre ce qui arrive. À coup sûr, le pauvre s’imagine déjà en prison pour un crime qu’il n’a pas commis. Heureusement que le cerveau du groupe, celui qui mangeait, reprend la parole avant qu’il ne soit trop tard :

— Nan mais c’est bon, on n’y touche plus à vos bestioles. De toute façon, qui voudrait d'un abruti de mouton ? Venez les gars, on se tire.

Les deux autres ne se font pas prier. Y’a même celui avec le Carapuce qui s’excuse d’un « pardon m’sieur » marmonné dans sa barbe avant de taper un sprint et rejoindre son camarade. Quant à moi, j’accoure vers le shérif en criant à la victoire :

— Whaou ! T’as été trop génial ! Grâce à toi, ils vont plus faire de bêtises ! Du coup, on a fini ? On va tout dire à Gaston pour qu'il soit plus inquiet ?

Du moins, on l’espère ? En vérité, rien n’est moins sûr. Vu la tronche que tirent les deux qui n’ont pas été directement interpellés par Edwin, on peut être sûr qu’un désir de vengeance commence déjà à creuser leur esprit de fauteur de troubles. Pour ma part, j’ignore tout cela, c’est vraiment pas ma spécialité les humains, je me fais toujours avoir par les gens qui mentent !
Les trois types commencent à s’éloigner sans demander leur reste, considérant qu’on en restera là tant qu’ils suivent l’ordre d’Edwin. Et moi, je les oublie déjà. Même si Ciboulette, dans ma tête, il a l’air de bien en rigoler, de ma naïveté.

Suite au petit discours d'Edwin, la réponse de Kata était parfaite ! Après tout, c'était d'une logique enfantine : une fois les trois fauteurs de trouble sous les verrous, si les vols cessaient, les coupables étaient désignés ! Pas besoin d'enquête, de surveillance et de flagrant délit. Néanmoins, les principaux concernés ne semblaient pas vraiment de cet avis... Le dresseur transpirait à grosses gouttes et même son Carapuce semblait avoir compris ce qu'il se passait et commençait à paniquer. Custer n'avait plus besoin de le viser, il était presque déçu de ne pas pouvoir attaquer et ainsi prouver qu'il était un aussi bon tireur que le shérif.

Malgré tout l'un des agitateurs, celui qui grignotait et qui semblait être le boss de la bande, était visiblement moins nerveux que les autres. Il ordonna le départ de la petite troupe tout en insultant les Moumoutons au passage. Qu'il garde ses grossièretés pour les moutons, ça lui évitera de prendre de coups de santiag dans les fesses... Les deux autres s'enfuirent en vitesse et le Carapuce bredouilla quelque chose avant de filer rejoindre le petit groupe.
Edwin n'eut pas le temps de souffler que Kata se précipita vers lui tout en le félicitant ! La jeune ranger célébrait cette victoire et s'interrogeait déjà sur la suite des événements. Le cow boy observa un moment le trio qui s'éloignait, cherchant à s'assurer qu'ils quittent bien l'endroit, avant de répondre :

Ouaip, j'crois bien qu'on a gagné ! Mais j'pense pas qu'ils vont en rester là. Celui qui grignotait a l'air d'avoir un sale caractère... Attendons quelques minutes, je veux être sûr que ces pieds-tendre quittent Kedal ! Après on ira prévenir Gaston.

Le Flingouste quitta sa cachette, se dirigeant vers le shérif avec une fierté non dissimulée. Dommage qu'il n'ait pas eu l'occasion de prouver qu'il était bien le plus grand caïd de Kedal ! Enfin un caïd qui servait l'ordre et la justice ! Edwin lui fit un petit signe de tête complice, sachant très bien que Custer avait assuré ses arrières pendant la discussion avec les fauteurs de trouble. Il déclara ensuite, sur un ton amusé :

C'est presque plus simple à gérer que nos missions de ranger, non ? Et j'préfère ça que de vrais voleurs de bétail...

Il observa un moment la Gruikui et surtout la Voltali, notant bien que cette dernière était plutôt amorphe depuis le début de cette aventure.

Ta Voltali semble un peu fatiguée. C'est un Pokémon plutôt nerveux d'habitude, elle n'est pas malade au moins ?

Il imaginait aisément que la mort de la mère de Kata n'était pas étranger à l'état actuel de Volti. Mais c'était pour lui un moyen d'aborder le sujet en étant moins bourru que d'habitude.

Whaou, il est vraiment intelligent Edwin ! Il a deviné qu’ils allaient peut-être refaire des bêtises quand même ! Je hoche la tête à répétition avec un air très sérieux. Oui, oui ! Faut vraiment qu’on les surveille pour être sûrs qu’ils en restent pas là !

Car en effet, les squatteurs prenaient leur temps pour quitter les lieux, marchant d’un pas lent jusqu’aux frontières du village sans cesser leurs coups d’œil méfiants dans notre direction. Le grignoteur, notamment, n’arrête pas d’observer Edwin, comme s’il attendait la moindre occasion pour réagir. Mais il fait très attention notre sheriff ! il se fera pas avoir comme ça ! Comme il le dit, tout ça est encore plus simple qu’une mission de ranger !

— Oui ! On est même pas fatigués ! Puis les Moumoutons ils ont pas à avoir peur au moins.

C’est toujours la panique quand un vrai voleur passe et que des Pokémon disparaissent. Après, tout le village se retrouve à cran et met en place des mesures vraiment désagréables pour les Pokémon. Certaines les attachent avec des cordes, les parquent dans des tout petit champs pour les surveiller… C’est bien mieux que ce soit le sheriff et moi qui nous occupons des voleurs et que les Pokémon soient tranquilles !

Edwin se lance ensuite sur un tout autre sujet en voyant Volti et Couenne ressortir des buissons d’un pas lancinant. En effet, elle va vraiment pas bien Volti. Je m’accroupis pour caresser la Voltali, laquelle détourne aussitôt le regard.

— C’est comme ça depuis qu’on a perdu maman. Papa et Volti ils font plus rien et ils sont tout le temps triste.

La renarde baisse la tête, définitivement plus abattue que moi par le sujet. J’arrive à rester neutre, comme souvent, comme si cela ne m’atteignait pas. Difficile d’imaginer qu’une enfant soit aussi forte que ça, au point de passer outre la perte de sa mère en si peu de temps.

— En plus, papa il arrête pas de dire que c’est la faute de Volti, alors il s’occupe même plus d’elle. Du coup moi j’essaye de la faire venir un peu en mission ou sortir pour se balader, pasque faut pas qu’elle reste tout le temps enfermée ! Mais elle me suit tout le temps comme ça sans rien faire. Alors je sais plus quoi faire de plus.

La petite Gruikui lui tourne autour, cherchant à capter le regard de la renarde déprimé par ses grognement joyeux. Couenne, au moins, elle veut rien faire pour pas se salir, mais elle est de bonne humeur ! Faut dire, maintenant que j’y pense, c’est la seule à n’avoir jamais connu maman.
La Voltali souffle en secouant la tête, cherchant à me repousser pour que je passe à autre chose et qu’on reprenne l’aventure avec le sheriff sans s’occuper d’elle.

En effet, y’a un peu d’agitation du côté des trois touristes. Le dresseur vient de pointer du doigt quelque chose au loin : le Moumouton à la laine d’or ! C’est un peu la starlette de Kedal. Un Moumouton Mistral qui avait même remporté les meilleurs prix du dernier salon de l’agriculture ! Malheureusement, son dresseur a lui aussi succombé à l’apocalypse. Aujourd’hui, le village tout entier prend soin de ce Pokémon et du restant du troupeau de l’éleveur disparu.


On dirait pas qu’ils osent s’en approcher avec le sheriff non loin d’eux, mais les 3 garçons se sont définitivement arrêtés pour échanger des messes basses à la vue de la rareté du village.

Maintenant qu'ils s'étaient éloignés, les fauteurs de trouble n'avaient plus l'air pressés de quitter les lieux. Ils jetaient quelques regards furtifs et progressaient lentement, ce qui avait le don d'agacer le shérif. Serait-ce une ultime provocation ? Du style "on obéit mais pas trop quand même"? Edwin se contentait d'observer de loin, s'imaginant que ce petit jeu ne durerait pas et qu'ils finiraient bien par partir.

La jeune ranger expliqua pourquoi la Voltali paraissait si apathique et elle indiqua également que son père était dans le même état. La raison paraissait évidente : la mort de la mère de Kata ! Le shérif prit une moue grave et hocha légèrement la tête. Il était silencieux mais notait que l'enfant restait neutre et semblait avoir déjà encaissé le choc du décès de sa mère. Cela l’inquiétait un peu : cachait-elle ses sentiments pour paraître forte ?
Kata précisa également que son père tenait Volti pour responsable de ce qui s'était passé, délaissant la Pokémon au passage. Du coup, c'est la jeune ranger qui s'occupait de la Voltali et cherchait à lui changer les idées. Sans grand succès malheureusement...

Quel tragédie pour le père de Kata, lui qui était un Ranger si réputé à Kedal ! Plus personne ne le voyait en mission, il passait sûrement ses journées à déprimer... Edwin n'était pas vraiment doué pour le dialogue mais il voulait aider et il finit par sortir de son silence :

Kata, dés que possible, j'irais parler à ton père. J'te promets rien mais on va tout tenter pour les rabibocher ces deux-là !

D'un signe de la tête, il désigna la Voltali qui ne semblait guère convaincu et cherchait à pousser Kata afin que tout le monde reprenne la mission. Même la Gruikui, qui était sûrement la plus joyeuse du groupe, tentait elle-aussi d'égayer la renarde !
Des couinements moins joyeux se firent brusquement entendre ! Il s'agissait du Flingouste qui s'agitait et cherchait à attirer l'attention de tout le monde. Avec la plus grosse de ses pinces, il désigna le petit groupe d'agitateurs un peu plus loin. En effet, ceux-ci s'étaient immobilisés et chuchotaient entre eux. L'un des trois pointa une direction mais Edwin ne comprit pas tout de suite ce qui les intéressait... Il s'interrogea à haute voix :

Qu'est-ce qu'ils attendent comme ça ? On va être obligé de les pousser un peu pour qu'ils rentrent chez eux...

Néanmoins, le cow-boy était toujours réticent à l'idée de leur courir après. Il imaginait qu'au moindre sprint, les touristes allaient détaler à leur tour et s'éparpiller dans tous les sens. Ce serait une course poursuite fatigante et inutile. Il restait donc planté là, à les observer comme un Ratentif et son regard finit par se poser sur le troupeau de Moumoutons. L'un des Pokémons attira particulièrement son regard.

Dis Kata, le Moumouton avec les grandes cornes, c'est pas celui qui participe à tous les concours ?

La fameuse star des concours dont le propriétaire n'était plus de ce monde... Custer démarra comme une flèche, fonçant vers le Moumouton en question aussi vite que ses petites pattes ne le lui permettaient ! Le Flingouste avait tout de suite compris lui ! Edwin soupira longuement avant de déclarer, un poil ironique :

J'crois la mission n'est pas tout à fait terminée finalement...

Rien ne pouvait être si simple et, à contrecœur, notre shérif se préparait à courir.

Vraiment ? Monsieur le shériff qui prendrait de son temps juste pour aider papa et Volti ? Mais c’est trop gentil de sa part ! En l’entendant, on dirait que je retrouve espoir, la bouche entrouverte d’ébahissement ! Puis je lui saute dessus, tout simplement, pour un énorme câlin de remerciement.

— Oh, merci, merci, merci ! Ça serait trop trop gentil ! T’es le meilleur !

Faut dire que la majorité des gens ont le réflexe inverse, ces jours-ci. Plutôt éviter la colère du paternel ! La boisson n’aidant pas, il a déjà renvoyé d’un claquement de porte les quelques courageux qui ont osé venir s’enquérir de son état. C’est marrant d’ailleurs, y’a bien que Gaston pour oser venir lui parler ces temps-ci ! Le meneur improvisé de Kedal cherche toujours à profiter des talents de papa en lui refourguant l’une ou l’autre des tâches qu’il effectuait autrefois… Mais non, papa n’a encore cédé à rien jusqu’ici, et Gaston repart toujours en rouspétant.

Volti semble moins convaincue. Quand je relâche Edwin, elle secoue la tête, l’air déjà lasse d’une future discussion inutile. Pourtant, je reviens déjà vers elle pour la prendre dans mes bras comme je l’ai fait avec Edwin.

— T’as entendu ça, Volti ? Le shérif il va vous aider tout plein !

Ce pourrait être effrayant de voir une enfant se jeter ainsi sur un Pokémon aussi piquant, mais je suis l’une des rares personnes qui a la chance de sentir le pelage de Volti s’attendrir à mon contact. Pour me permettre de l’enlacer.

Hélas, on n’aura pas beaucoup plus de temps pour en profiter ! Pendant ce temps, Edwin surveillait à nouveau les 3 garnements, et il a repéré quelque chose.

— Le Moumouton ?

Je relève la tête, observant la créature dont il parle.

— Ah oui, c’est lui ! Pour…

Pas le temps de poser la question, le Pokémon d’Edwin est parti comme une flèche, et on se retrouve à le suivre ! Comme le shérif dit : on en a pas fini avec eux.

Finalement, ils n’ont pas résisté à l’envie. Le dresseur de Carapuce s’est saisi d’une pokeball puis l’a lancée en direction du troupeau, cherchant à atteindre le fameux Moumouton. Heureusement, pour lui du moins, la ball manqua sa cible et atteignit un autre Moumouton qui s’y retrouva enfermé, le pauvre !

— Oh non ! Mais qu’est-ce qu’ils font ?

Déjà, le troupeau part en débandade, leurs bêlements de panique résonant jusqu’à nous.
Le garçon, quant à lui, parait triomphant ! Le voilà rire à gorge déployée avant de s’exclamer :

— Haha ! J'en étais sûr, ceux-là ils sont sauvages ! À nous le mistral !

Mais ils n’ont rien pigé en fait ? Les éleveurs, ils vont pas acheter une pokeball par Moumouton qu’ils ont, vu la taille de leur troupeau ! Ils sont trop bête les gens de la ville !
Hélas, cette fois, non seulement le voleur passe à l’action, mais il se croit dans son droit. Edwin arrivera-t-il à leur faire entendre raison une seconde fois ? Déjà, le Carapuce essaye de se lancer à la poursuite du Moumouton Mistral, bien décidé à l’affaiblir suffisamment pour qu’il subisse le même sort qu’à son camarade.

Tout cela n’amène, malheureusement, toujours aucune réaction de Volti. La renarde regarde faire d’un air dépité, las. Même Couenne semble plus encline à réagir ! Son mignon petit museau rougeoie de colère sans pour autant oser cracher ces flammèches qui pourraient noircir son petit corps tout propre. Quant à moi, je cours après Edwin, à ses ordres ! Je sais pas comment les deux autres garçons vont réagir en nous voyant redébarquer… je sens que ça va mal finir tout ça !

Edwin fut légèrement surpris lorsque Kata lui bondit dessus pour le prendre dans ses bras ! Mais il était heureux que son aide fasse si plaisir à la jeune ranger. La Voltali se laissa enlacer à son tour même si elle semblait clairement moins enjouée par cette idée de réconciliation...
Néanmoins, pour le moment, il y a avait toujours ce petit problème de touristes à résoudre. Et il venait d'empirer en quelques secondes !

Le trio de fauteurs de trouble avait bien une nouvelle idée derrière la tête ! Lançant une pokéball, l'apprenti dresseur tenta d'attraper le pokémon Mistral mais loupa sa cible de peu, capturant un autre Moumouton. Son Carapuce était bien résolu à combattre avec la « star » de Kedal, désireux d'aider son dresseur à capturer la bonne cible.
Mais Custer avait pris de l'avance et comptait bien ruiner les plans de l'autre Pokémon ! Il braqua la plus imposante de ses pinces en direction de l'agresseur et lança une attaque pistolet à O qui fit mouche ! Certes ça ne suffira clairement pas pour mettre le Carapuce KO mais ça devrait retenir son attention pendant un petit moment.

De son côté, Edwin commença à courir en direction du groupe, grommelant quelques insultes dans sa barbe. Lui qui ne voulait pas se fatiguer aujourd'hui... Durant sa course, il remarqua que Kata était juste derrière lui. Il lui lança donc :

Kata, protège le Moumouton aux grandes cornes ! Moi j'vais m'occuper des trois idiots !

Le shérif se dirigea au pas de course vers l'apprenti dresseur et son Carapuce, cherchant à l'empêcher de tenter un second lancer de pokéball. Se rapprochant, haletant, il interpella à nouveau le petit groupe :

Ils ne sont pas sauvages ! Z'êtes des voleurs de bétail, arrêtez immédiatement et je m'arrange pour pas vous ficeler et vous laisser moisir en cellule !

Histoire de montrer qu'il ne blaguait pas, Edwin attrapa son fusil et ralentit sa course, tenant l'arme fermement sans pour autant mettre les touristes en joue. L'idée d'un tir de semonce lui traversa l'esprit mais le troupeau était proche et les Moumoutons étaient suffisamment paniqués comme ça. En dernier recours peut-être...
Le plus dur était de garder un œil sur les trois fauteurs de trouble afin d'éviter que l'un d'entre eux ne tente une action en traître. Custer veillait au grain pour protéger son partenaire, se préparant à contrer le Carapuce.

Ah ça, il ne s’y attendait pas le Carapuce ! Lui qui pensait avoir à combattre un mouton, recevoir un jet d’eau l’avait bien refroidi. Néanmoins, il se releva, son estime lui interdisant de s’avouer vaincu aussi vite face à un autre Pokémon eau. Ne désirant pas jouer les tireurs face à un Pokémon aussi bien armé, la tortue s’élance pour une charge au corps à corps, qui laissera bien assez de temps à Custer pour une seconde attaque avant d’atteindre sa cible.

De mon côté, j’obéis à nouveau sans la moindre hésitation au shérif. Je m’interpose donc entre les vilains et le mouton, bras en croix pour leur signifier qu’ils ne toucheront plus à aucun de ces Pokémon tant que je serais là. Je vais même ramasser la pokeball au sol pour en libérer le premier capturé et exploser la machine infernale sous mes pieds. Nah ! Pas question que je laisse quelqu’un voler un Pokémon, namého !
Je sens que derrière-moi, le Moumouton s’est rapproché pour me remercier de son museau contre ma jambe. Je remarque aussi que son amie Wattouat est auprès de lui, comme toujours, en bonne intrue jaunâtre perdue au milieu de tout ce coton blanc. Je les connais bien, ils savent qu’avec moi ils risquent rien !

De son côté, Couenne joue les pompom girl. Elle bondit sur place sans oser s’approcher par crainte d’être aspergée, puis encourage Custer afin qu’il mette une belle raclée à cet idiot de Carapuce. Et vite, hein ! Avant que quelqu’un d’autre ne soit mouillé !

Hélas, si tout semble bien se passer, les voleurs, eux, n’en démordent pas :

— Hé ! Z’avez pas le droit de faire ça ! En plus vous mentez ! Je l’ai capturé, il est à moi le mouton, il était bien sauvage ! Faut me repayer ma pokeball !

Néanmoins, il déglutit rapidement en revoyant l’arme du shérif. À nouveau, Edwin n’allait pas avoir à insister bien longtemps pour convaincre le jeune dresseur, tout comme l’autre trouillard en arrière qui tirait déjà sur les vêtements du meneur pour lui intimer discrètement qu’ils feraient mieux de se carapater et laisser là leur camarade en tort.
Sauf que le meneur, lui, avec son paquet de biscuit toujours pas vide, il semble vouloir en rajouter une couche. Il va sauter sur l’occasion, clamant à son tour qu’un Pokémon capturable est un Pokémon sauvage. Sauf que…

— C’est n’importe quoi ! Quand j’vais raconter ça à…

C’est à peu près tout ce qu’il aura le temps de dire. Surement allait-il citer le nom de son père, sa mère, ou un oncle riche de sa famille… En tout cas, il n’aurait pas dû jouer les courageux en agrippant l’une des pokeball à sa ceinture. Un Tonnerre déferla sans prévenir, en ligne droite sur le gamin pour le foudroyer sans ménagement.
Si Edwin avait eu l’idée d’un tir de sommation sans en venir au geste, Volti en a eu assez et a directement sauté à l’étape suivante. Bien sûr, elle sait se retenir, n’empêche qu’il va voir des cloches pour un bon moment le gars. Son pote trouillard semble d’ailleurs assez inquiet, il en est tombé à la renverse et tremble de tous ses membres, terrifié à l’idée d’être le suivant.  C’est évident qu’elle a agi par lassitude plus que par désir d’aider. Même après cette attaque, elle garde son regard blasé tandis qu’elle s’assoit sur place, l’une de ses pattes grattant le sol d’un air pressé.
Oh, et le troupeau est parti en débandade, comme prévu. Faut dire qu’elle est connue parmi les moutons également, la Volti. Personne n’a eu de bonne expérience en étant ramené de force par la renarde électrique, elle n’a jamais été très patiente.

Custer était plutôt fier de sa première attaque ! Il avait clairement détourner l'attention du Carapuce mais à présent celui-ci voulait en découdre au corps à corps ! Le Flingouste était un excellent tireur mais il risquait de se retrouver en mauvaise posture avec un adversaire bien armuré et un peu trop proche... Sans hésiter, et sous les encouragements de la Gruikui, il leva à nouveau sa pince en direction de son adversaire qui chargeait pour lancer une seconde attaque, cherchant à couper l'élan de la tortue.

Pendant ce temps, Kata avait parfaitement rempli son rôle. En effet, le Moumouton était de nouveau libre et elle s'était interposée afin d'éviter un nouveau lancer de Pokéball. Cela eut pour conséquence d'agacer sérieusement le dresseur qui fut pourtant contraint de baisser d'un ton lorsque le shérif arrivait à sa hauteur. Lui repayer sa Pokéball ? Sérieusement ?!

La ferme et ouvre bien tes oreilles! Il n'y a que des Pokémons d'élevage ici et ils ont tous un propriétaire ! Tout le monde sait ça ! Et les dresseurs dans ton genre n'sont pas les bienvenus ici...

Oui, pour des Kedalois c'était logique. Pour Edwin il était donc difficile de se mettre à la place d'un dresseur qui considérait qu'un Pokémon « capturable » lui appartenait forcément... D'ailleurs voilà que le meneur semblait vouloir prendre la parole pour soutenir son ami. Il voulut mentionner quelqu'un d'important pour lui, ce qui provoqua chez le shérif le début d'un rictus amusé. Ce fut de courte durée car un éclair bruyant et lumineux foudroya brusquement le garçon !

Nom de...

Edwin sursauta sur place et frôla la crise cardiaque ! Même Custer avait eut un mouvement de panique ! Le touriste était-il bon à enterré six pied sous terre ? Heureusement non mais il serait sérieusement sonné pour un moment. L'origine de cette attaque ne faisait guère de doute et le shérif se retourna brièvement en direction de la Voltali qui semblait toujours lassée par cette petite sortie au grand air. Il soupira bruyamment, à la fois soulagé après l'effet de surprise et un peu agacé par ce « tir » qui ne faisait pas partie du plan.

Bien, j'crois que le message est passé cette fois. Considérez ça comme un avertissement... Allez, ramassez votre pote et fichez le camp ! Et en vitesse!

Il lança un nouveau regard à la Voltali et reprit la parole, s'efforçant de paraître impassible :

On dirait que je ne suis pas le seul à avoir la gâchette facile... J'crois que nos invités vont quitter les lieux mais de notre côté, tâchons de calmer un peu le troupeau ! En douceur cette fois...

Edwin siffla bruyamment, cherchant à retrouver le Ponchien du propriétaire histoire que celui-ci puisse reprendre son rôle. Il extirpa ensuite une cigarette de ses poches, attendant patiemment que les touristes partent. Définitivement, cette fois...

La tortue est frappée de plein fouet par la seconde attaque de Custer. Outch ! Mais elle insiste, cherchant à poursuivre son avancée malgré ces attaques qui s’écrasent sur sa carapace. Du moins, jusqu’à entendre la déferlante électrique ! Son attention se porte aussitôt sur son camarade foudroyé. Elle en oublie de résister et se fait propulser sur son dresseur qui n’a pas le réflexe de rattraper son Pokémon. La tortue lui arrive en plein torse, de quoi le réveiller un peu pour qu’il se carapate à toute vitesse, son Pokémon sous le bras, abandonnant là ses deux copains !

Heureusement que l’autre trouillard est resté, même s’il est encore tétanisé. Au moins lui, il pourra ramener son ami. Ce qu’il fait d’ailleurs, après un dernier sermon du shérif. J’expire toute cette tension accumulée, soulagée que ce soit enfin fini.
Volti renvoie au regard du shérif un air blasé, l’air de lui demander s’il en a enfin fini avec ses bêtises, comme s’il ne s’était rien passé d’incroyable. J’ai un petit rire nerveux en la voyant faire, bien consciente du caractère trempé de ma grande sœur :

— Et encore, quand elle va bien c’est pire ! Elle l’aurait fait tout de suite !

Je me surprends même à être contente de l’avoir vue massacrer ce voleur prétentieux. Ça montre que c’est pas sans espoir, doit y’avoir moyen de la remotiver, ma Volti ! Au grand damne de tous ceux qui ne respectent pas les règles.

Allez, maintenant, au boulot ! Je m’approche d’abord du Moumouton mistral pour le rassurer d’une bonne caresse sur le crâne, puis me voilà qui coure après tous les moutons enfuis un par un ! L’avantage, c’est que comme tous les humains se connaissent par ici, tous les Moumoutons nous connaissent aussi. En particulier moi, je traine souvent vers les troupeaux pour donner un coup de main aux éleveurs, alors ils se laissent faire pour la majorité. En revanche, j’ai pas la technique. Il me faudrait un toutou, pour les remettre en cercle comme ils font les Ponchien !

En parlant de Ponchien, Edwin a été plus intelligent que moi et a fini par retrouver le chien en sifflant, ainsi qu'un des éleveurs du coin attiré par le coup de tonnerre.

— Eh beh, qu’est-ce y s’est passé ici ? Médor, r’mène moi l’troupeau, t’veux ?

Le chien s’exécute pour me remplacer, bien plus efficace que moi dans cette tâche.
Je laisse Edwin répondre au monsieur et reprend plutôt la conversation après cela :

— Pfiouuu ! Tu crois que c’est fini cette fois ? Sont vraiment bêtes les gens de la ville à toujours croire que nos Pokémon ils sont sauvages ! Pourquoi ils comprennent jamais ?

On dirait qu’on est bons ! Le premier s’est tiré en courant, et l’autre trimballe son pote sur le dos dans une ligne droite direction Bivouac. Le tout avec un bon souvenir pour qu’ils ne reviennent jamais !
Aux côtés du shérif, Couenne se montre des plus ravies et couvre Custer d’éloges ! Elle a beau se montrer trouillarde et avoir horreur de se salir, elle sait reconnaître la valeur d’un combattant ! D’autant plus lorsqu’il la protège ! Enfin, ce n’était pas vraiment elle la cible, mais c’était tout comme. Et puis, il a réussi à battre l’autre sans subir d’attaque – et donc se salir –, et ça c’est d’autant plus cool à ses yeux !

Cette fois, les touristes s'exécutèrent rapidement, quittant les lieux sans demander leur reste. L'apprenti dresseur fut le premier à partir avec son pokémon sous le bras bientôt rejoint par son copain qui soutenait le meneur encore tétanisé. Bien, ça leur fera une aventure à raconter...
Edwin pouvait maintenant replacer son arme dans son dos et il put tranquillement terminer sa cigarette tout en observant le troupeau. Il nota l'air blasé de la Voltali et hocha légèrement la tête lorsque Kata lui avouait qu'en temps normal, la renarde électrique n'était pas aussi patiente. Il se racla bruyamment la gorge, sans doute un peu jaloux du tir de la Voltali même si ça, il ne l'avouera pas !

Kata se démenait autant que possible pour calmer et regrouper tous les Moumoutons sous l’œil impressionné du shérif. Rapidement, en réaction aux sifflements, le Ponchien montra à nouveau le bout de son museau. Le propriétaire du troupeau le suivait de prêt, sûrement inquiet après l'attaque de Volti qui n'avait clairement pas passé inaperçue aux alentours. Edwin cherchant donc à rassurer l'éleveur :

Rien d'grave, quelques pieds-tendres qui cherchaient à asticoter le troupeau. Il désigna Kata d'un geste de la tête. Elle m'a avertit et à nous deux, on a résolu le problème ! Pour sûr, ils ne reviendront pas et aucune des bêtes ne manque à l'appel !

Inutile de trop rentrer dans les détails, l'éleveur devait surtout se soucier de ses bêtes. Pour la suite, le shérif le laissait gérer son troupeau afin de reprendre sa petite discussion avec Kata. En l'écoutant, il acquiesça avant de répondre :

J'crois que c'est fini ! Du moins, pour aujourd'hui... Les gens de la ville s'croient partout chez eux, ils ne respectent rien... Et les dresseurs, ils cherchent juste à collectionner les Pokémons. On dirait que ceux-là ont reçu une leçon qu'ils ne sont pas prêt d'oublier...

Le flingouste rejoignit le petit groupe avec une certaine fierté ! Certes, son combat contre le Carapuce avait été écourté mais les acclamations de Couenne suffisait à son bonheur. Il bombait le torse et mima avec sa pince le maniement d'un revolver. Edwin sourit tout en levant les yeux au ciel.

Nous devrions rentrer et dire à Gaston que le problème est réglé.

Il salua l'éleveur, réajusta son manteau et prit la direction de Kedal. Avec un peu de chance, il pourrait peut-être reprendre sa sieste là où elle s'était interrompue...