Saison Un

: Obscure Prophétie

Il semblerait que malgré ses nombreuses années à guerroyer, le guisarmier n'avait nullement atteint son paroxysme. Il lui restait tant à apprendre et ce n'étaient pas ces deux cents années passées à dormir qui allait lui infirmer cette dure constatation. Les techniques de combat avaient évoluées pour n'en devenir que plus performantes. Il allait devoir redoubler d'effort s'il voulait un jour pouvoir survivre seul en ce nouveau monde.

Pourtant malgré ses défaite, aucune honte ni même colère ne se dégageait du vieux combattant, seulement de la fierté d'en avoir appris toujours plus et d'avoir put croiser le fer avec un ami. Cela lui rappelait toutes ces bonnes années de franches camaraderies et qu'importe l'hilarité de Duchesse ou même de Lieutenant Qiu face à sa défaite – décidément il n'avait nullement compris le quiproquo de la situation -  cela n’entacha aucunement son humeur.

Par contre son ami semblait fort ému de ce haut fait, était-il donc à ce point ? Il ne fallait pas voyons ! Il n'était qu'un vieillard un peu rouillé, point d'obligation de ce mettre dans de tels émois pour si peu. Il en claqua une main amicale contre l’omoplate de l'autre colosse tout en laissant éclater un franc mais tonitruant éclat de rire.

« - Point de solennité entre nous, mon ami, tu m'as battu avec honneur et bravoure et je suis fort heureux d'avoir pu apprendre une nouvelle technique de combat ! Il me tarde d'en connaître d'avantage ! »  

Peut-être la Couafarelle était-elle dotée du talent Cœur de coq mais il semblerait qu'au lieu d'aller se cacher derrière l'Escouade après l’œillade noire d'Anty, cette dernière lui offrit un sourire dévoilant ses crocs tout en remuant de la queue. Décidément ces deux humains étaient hilarants ensembles ! Elle devrait venir plus souvent lorsqu'ils s’entraînaient et puis apparemment, elle pouvait compter sur la complicité du Pandarbare pour être de son coté.

Pendant ce temps, le vieux guerrier s'était dirigé vers le sac présenté par son ami et en sorti une gourde transparente de laquelle il put s'abreuver, ainsi donc cette étrange chose était appelée bouteille. Il ne les connaissait qu'en verre et bien protégée à la base par de la corde. Les techniques avaient tant évoluées depuis son long sommeil, s'en était comme s'il devait tout réapprendre depuis le début.

« - Grand merci pour cette attention et c'est avec plaisir et honneur que l'on fera la prochaine fois un duel à l'épée. Vous vous battez encore avec pareilles armes ? Pourtant il me semblait que la paix régnait désormais à Mistral... enfin si l'on en oublie le retour des cavaliers. »  

S'asseyant, il en profita pour s'essuyer avec son poignet les quelques gouttes de sueurs qui étaient apparues le long de son visage. Un toilettage ne lui serait nullement un luxe s'il ne voulait pas sentir l'Ursaring à des kilomètres. Il s'enquit donc de savoir où trouver de quoi se rincer.

« - Maréchal, pourrais-je connaître le puits le plus proche afin que je puisse m'y laver le plus promptement possible. Fort heureusement cette journée n'est pas très fraîche ! »  

Apparemment, durant son séjour chez Técla, il n'avait guère trouvé l'utilité de la douche...

Les deux colosses se désaltérant tout en échangeant quelques mondanités, le plus vieux des deux se prit à imaginer quelles nouvelles techniques pourrait lui apprendre son cadet. Si elles étaient tout aussi efficaces que cette « clef de bras » dont il avait été le prisonnier, il ne lui tardait d'en apprendre d'avantage. Toutefois leurs échanges avaient été éreintant et il était plus que temps de se laver. Un bon coup de seau d'eau et ils seraient purifiés de toute cette crasse qui les avait recouvert durant leurs échanges musculeux.

Si la première partie de leur conversation l'avait mis de bonne humeur, cela changea radicalement à l'énonciation des cavaliers et d'autres groupuscules qui étaient apparus avec le temps. « Notra », « Tim Roquette » : que d'étranges noms pour de vils scélérats et ils avaient à leurs bottes beaucoup de bandits prêts à semer chaos et peine sur le chemin. L'ire dont faisait preuve le plus jeune se répercuta bien vite sur le vieux chevalier. Ainsi donc, qu'importe l'époque, il y aurait toujours des bandits pour terroriser les honnêtes badauds.

Quel dommage que l'enfermement en place publique ou l’amputation du membre pécheur ne soit plus d'actualité car il était persuadé que cela effrayerait les plus pleutres et les ferait réfléchir à deux fois avant d'agir. Ses méthodes de sanctions semblaient certes barbares à leurs yeux mais elles avaient fait leur preuves. Tout comme cela avait conduit à quelques regrettables affaires.

« - Alors il nous faut nous préparer à leur tenir tête. Il faut leur montrer que nous n'avons nullement peur de ces faquins et instaurer celle-ci dans leur cœur. Ainsi déboussolés, il serait plus aisé de transpercer leurs lignes. »  

Peut-être que Saint Helix l'avait envoyé sur la route du Maréchal pour l'aider à pourfendre tous ces forbans afin de se purifier de ses propres péchés. En mêlant anciennes stratégies et nouvelles technologies, peut-être que cela permettrait de faire fléchir la gangrène qui sévissait à Mistral.

Alors que le chevalier déchu se relevait, son ami lui indiqua que les puits n'étaient plus l'unique façon de se laver. Pourquoi donc les Pignousaines qui venait le voir chaque matin ne le lui avait point dit. Quelles vilaines celles-là ! Ainsi donc elles se gaussaient de lui et ce n'était point des sourires de bienveillance qu'elles lui offraient, pourtant il lui semblait avoir décelé dans leur regard de l'admiration. Il fallait qu'il en ait le cœur net.

« - Pourtant les dames qui viennent me saluer chaque matin ne m'en ont jamais fait part. Connais-tu la raison à cela ? »  

Pauvre Adalbert, malgré son grand âge sa piété et son abnégation en avait fait un parfait naïf. De quoi gêner une fois de plus son pauvre guide face à ses questions somme toutes innocentes. Tout en l'écoutant, il le suivi jusqu'à de drôles de cabines, semblables à des latrines, et qui étaient rehaussées d'un drôle de champignon duquel s'échappa de l'eau.

Bon élève, les deux bras croisés dans son dos, Adalbert assistait ébaubit au domptage de l'eau qu'avait réussi l'humanité depuis qu'il s'était endormi. Ainsi donc la pièce où trônait une baignoire dans son gîte était bien une pièce pour se laver sans à avoir à souffrir des affres de mère nature. Ainsi donc le levier servait à choisir la température de l'eau. Quelle invention forte utile ! Attrapant avec joie le flacon de savon et la serviette, le colosse fini par se déculotter une nouvelle fois sans se souvenir de refermer le rideau comme la fois où il s'était changé dans l'échoppe.

S'il maniait désormais la douche avec dextérité, il découvrit à ses dépends que le savon dans les yeux, ça piquait. Tel un Tauros, le voilà beugler sous la douleur qui lui brûlait les yeux tout en appelant à l'aide son ami.

« - Messire Anty ! Je ne vois plus ! Mes yeux me font souffrir ! Que dois-je faire ? »  

Fort heureusement il n'eut guère à attendre bien longtemps avant que son ami ne lui porte secours, créant de ce fait un nouveau quiproquos envers les agents de la maréchaussée. Après de telles aventures, les deux protagonistes avaient désormais une étiquette qui leur serait difficile d'enlever et bien entendu sans que le plus vieux des deux n'en comprenne le sens. Malgré ces incidents le reste de la journée se passa de manière fort agréable et c'est avec un sourire non dissimulé que le garde - ragaillardi par un peu de combat amical - quitta les lieux un peu plus tard dans la journée pour retourner dans le logis que dame Técla avait accepté de lui céder le temps qu'il se fasse de nouvelles marques.