Saison Un

: Obscure Prophétie

« Je les vois rarement grandir au final… Certaines personnes viennent me montrer comment se porte leur enfant, mais la plupart ne reviennent pas… »

Je souris pour empêcher mes yeux de briller de tristesse. Je n’allais pas pleurer pour ça, mais je ne voulais pas laisser transparaitre ma tristesse. C’était un peu les inconvénients du travail. On mettait beaucoup d’amour dans ces nouveau-nés, mais ceux-ci finissaient par disparaitre un jour ou l’autre.

Silencieuse, j’écoutais les propos d’Hector. C’était une vision triste des choses, mais je comprenais ses paroles. Se sentir moins que rien, rejetés de la société, sentir que notre disparition apporterait de la joie. Je comprenais que trop bien ses paroles. On me l’avait fait comprendre pendant une partie de ma vie, une longue partie.

« Tout le monde a son importance… Peu importe ce qu’on en dit… J’espère que tu trouveras ton bonheur où qu’il puisse être. »

Toute vie avait son importance. Toute vie devait être respectée. C’était un principe de base, mais si tout le monde l’appliquait, le monde serait tellement plus heureux. Essayant de ne pas trop me pencher sur ça, j’écoutais la suite des propos. Visiblement, il était comme moi. Il ignorait quoi faire avec ses parents s’il les retrouvait. C’était une question difficile après tout.

« Ha… Euh… Pas vraiment. Je n’ai pas une vie particulièrement intéressante. Je ne connais pas mon père… Et euh… J’étais élevé par ma mère… qui s’est…est morte… »

Comme à mon habitude, je restais floue sur mon passé. Je n’avais rien à cacher, mais je n’aimais guère en parler. Je préférais aisément me concentrer sur l’avenir. Ou le présent. Alors que dire de moi ? Hm, pas le plus simple honnêtement.

« Sinon… Je suis… éleveuse et ranger… Mais je fais des arènes et des thèses quand je le peux. Je suis un peu touche-à-tout, ahah. Et puis, euh… J’ai essayé d’être enquêtrice du surnaturel, mais je sais pas… Ca ne motive plus autant… »

Depuis combien de temps avais-je formé les Fan-tominus ? Je ne savais même plus, mais ça n’avait jamais pris. Il fallait dire que j’étais trop timide pour en parler clairement. Certaines personnes pensent que c’est même un centre pour pokemons handicapés. Où est-ce que j’avais échoué ?

« Et…euh… Voilà… »

Ca se disait qu’on avait une fille ? Je ne savais pas trop. Ca, c’était un truc tout nouveau aussi.

« Tu n’as pas à l’être. Il y a rien que tu aurais pu faire… Peut-être que ça a eu du bon… Peut-être que je n’aurais jamais rencontré les personnes que je connais maintenant. »

Comment aurait été ma vie sinon ? Aurais-je été ce que je suis ? Nul ne pouvait réellement le dire. Peut-être que la souffrance passée me permettait de m’ouvrir à ce nouveau bonheur. Si je pouvais changer mon passé, est-ce que je le ferais encore ? Je n’en savais rien. C’était si tendu, si complexe. Rah. Je devais oublier ça. Ce qui était fait était fait. Cela ne servait à rien de se torturer l’esprit sur des suppositions. A sa main sur l’épaule, je souris légèrement.

« Heu… Pas tant que ça… »

On pourrait croire que ma vie était riche d’aventure mais, au final, ma vie n’était pas extraordinaire. Je n’avais rien accompli de si incroyable ou hors du commun. Oui, j’étais une touche à tout, mais je ne renversais pas des montagnes. Je n’étais à la tête d’aucune grande entreprise. Je n’avais pas le pouvoir de changer la face du monde. J’étais… banale. Et cela me convenait parfaitement.

« Bah… Euh… J’ai un badge… J’ai testé l’arène normal de Vigneau. C’était pas très facile… Et c’était stressant… Et euh… Je fais… Enfin, j’ai fait une nouvelle recette pour soigner les problèmes de statut, mais en étant bon au goût. J’ai aussi… observé les problèmes de la détention de ces pokemons en laboratoire sans plus en sortir… J’espère que mes thèses seront validées… »

Spoiler alerte : seule mon invention le sera. Heureusement, je ne le savais pas encore à cette époque.

« Ce n’est vraiment pas grand-chose… Je débute de partout. Et… Je ne crois pas être capable de progresser dans tous ces domaines. Et toi ? Tu as déjà essayé de progresser dans une des licences officielles ? »

« Je comprends… Ce n’est pas toujours facile. Je dois avouer que je ne pense pas être spécialement douée. J’ai un peu fait toutes ses licences au grès de la vie. Chaque chose a ses avantages.»

Ranger, je l’avais commencé car je voulais aider les autres. Le métier d’éleveur m’est venu quand Luna trouva Haret. Scientifique ? C’était mon attrait pour le temple curiosité qui m’avait poussé à l’acheter. Même dresseur… Au final, je n’aimais pas vraiment ça. J’avais essayé pour faire plaisir à mes pokemons, mais je n’avais pas ça dans le sang. Peut-être continuerai-je un jour… Je ne savais pas encore.

Alors que ces pensées sombraient dans l’obscurité de mon esprit, la nuit nous engloutissait aussi. Avec elle, la chaleur diminuait aussi. Il était temps pour nous de rentrer pour ne pas interférer avec la quiétude des spectres. Visiblement, quelqu’un n’était pas du même avis. Le petit mélodelfe refusait de bouger… Il s’était même endormi le petit bout de chou.

«Hm… Attendons de sortir du cimetière ? Il va faire nuit, cela risque d’être encore plus effrayant pour lui. »

Comme pour ajouter du poids à mes paroles, une ombre piqua du ciel. Un rapasdepic venait de se poser. Nullement inquiète, je souris à l’oiseau. Il était de retour.

«Tu as bien volé, mon beau. Ha, je te présente Hector et Kozuki. Vous deux, je vous présente Rôti. »

Oui, ce n’était pas forcément le meilleur nom, mais c’était un pokemon qu’on m’avait confié. D’ailleurs, je connaissais suffisamment mon pokemon que pour savoir ce qu’il attendait. Il voulait rentrer dans sa ball.

« Désolé, je suis un peu chargée. On sort du cimetière et je te fais rentrer… D’ailleurs, Matagot… Tu veux bien libérer les trois autres pour nous guider ? »

Le pokemon orange s’approcha de moi et tapota sur mes pokeballs laissant échapper le reste de mon équipe. Ainsi, il sortit Luna, une petite sépiatop, Haret, le calme tentacruel et Aube, la funécire à la flamme rouge et aux yeux turquoise. Après une rapide présentation de chacun, je donnais quelques instructions à mes pokemons. Je ne les avais pas sorti que pour le plaisir (en grande partie, c’était vrai).

« Luna, Aube, vous voulez bien nous éclairer. Merci vous deux. »

Naturellement, Aube prit les devant et alla pour se poser sur la tête d’Hector. Oui, elle cherchait le point le plus haut pour se mettre en avant. Luna alla donc naturellement se poser sur ma tête et commença à activer sa bioluminescence. Roti s’envola de nouveau pendant qu’Obscura profitait des ténèbres pour réexplorer le cimetière.

« Si Aube te dérange, n’hésite pas à me le dire… Tout le monde n’est pas forcément à l’aise avec ça. »

Je gardais pour moi que les Funécire se nourrissaient de l’énergie vitale via leur flamme. Il n’y avait pas de raison d’inquiéter… Aube n’avait pas faim et elle savait se tenir.

Aube était ravie. Elle éclairait les lieux de sa lumière. Rapidement, on arriva à sortir du cimetière. Ce fut une rencontre intéressante et calme. J’étais prête à partir, même si je ne pus m’empêcher de lancer un regard triste sur le lieu. Cela faisait tellement longtemps que je n’avais pas passé une nuit parmi mes amis. Je réprimais le soupire qui me venait. Ca ne savait à rien de ressasser tout ça.

Mais un évènement imprévu arriva. Un groupe de cinq personnes vint brusquement dans le cimetière, bousculant Hector qui… ne tomba pas. Ouf, rien de casser. Penchant un peu ma tête sur le côté, j’essayais d’observer les jeunes en présence. Ha… De la musique ? Ils faisaient vraiment une soirée ? Mon cœur se souleva.

Comprenez bien. Ce n’était pas la première fois que je retrouvais des bouteilles dans le cimetière. Je les retirai à chaque fois. D’ailleurs… Quelqu’un semblait particulièrement remonter. Obscura était en colère. Même si elle était devenue une amie plus proche, elle venait toujours d’ici. La colère l’habitait en cet instant. Je le devinais même si l’obscurité la cachait de mes yeux.

Un Leopardus suivait le groupe. Avaient-ils songé qu’un type ténèbre les protégerait ? Peut-être. En tout cas, pour ma part, c’était surtout une immense tristesse qui s’abattait sur moi. Pourquoi les gens ne se rendaient pas compte du mal qu’ils faisaient ? Même si je détestais parler, je ne pouvais juste pas rester là, à ne rien faire. Tendant mes bras, je rendis le pokemon rose à son propriétaire.

«Tu peux partir, je vais juste arranger ce petit problème. »

Je n’avais pas la moindre idée de comment faire… Genre vraiment aucun, mais je fis un pas de côté et je raclais ma gorge. J’étais hésitante, tremblante dans mes mots et dans mes gestes.

« Excusez-moi… Mais…euh… C’est pas…pas…trop… »
« Haha, articule petite débile. Allez parle plus fort. »
« Je…Je… La musi… »
« Ouah, on va jamais y arriver. Allez laisse le gang des citrouilles faire ce qu’il veut »

Attends, quoi ? Encore eux ? Mais ils étaient à Vigneaux la dernière fois ? Oh, sérieusement ? Je ne voulais pas de problèmes. Cependant, Obscura connaissait aussi ces types. Le pokemon spectre devenait fureur. Alors, le geste de trop. Le chef me poussa. Je n’allais pas mentir. Il y a quelques semaines, je serais surement tombée sur le cul, mais je m’entrainai ardemment. Je ne fis donc qu’un pas en arrière, stabilisant ma position.

Cependant, cela créa une agitation chez mes pokemons. Du coin de l’œil, je vis Matagot prêt à sauter. Haret s’approchait déjà un tentacule entourant mon bras et un autre prêt à faucher une des personnes en face de moi. Derrière, Obscura revint un peu dans la lumière. Ses yeux brillaient de colère. Non, pas de violence, mon cri fut retentissant.

« STOP »

Mes pokemons s’arrêtaient secs alors que le groupe riait. Oui, ils pensaient que je demandais d’arrêter les rires… Non, je retenais mes pokemons de leur sauter dessus. Je détestais la violence… Les rires continuaient et je baissais la tête, honteuse de ne savoir comment arranger les choses. Ne pouvons-nous juste pas régler la chose calmement ? J’avais l’impression que non…