Saison Un

: Obscure Prophétie

« - Put*** de ch'val à la co* ! C'est décidé j'me casse ! Vous f'rez bien d'le buter avant qu'il n'bouffe tout Mistral c'co* ! »

Voilà quelles furent les douces paroles qui accueillirent le pauvre chevalier une fois son entrevue avec le roi passée. Et une scène des plus incongrues s'offrait à lui alors que le palefrenier qu'il avait fait réquisitionner pour entraîner Lisette: le pauvre homme se promenait désormais cul-nu tandis que l'animal en question, naseaux fumants, tenait le reste de son pantalon entre les dents et apparemment n'en avait pas fini.

D'ailleurs la voilà se cabrer et foncer dans la direction de l'individu qui ne se fit pas prier pour disparaître définitivement. Il ne se retourna même pas au moment où le barbu l'interpella à maintes reprises afin au moins de lui payer ce qu'il lui devait. Un soupir fini par ponctuer ses nombreuses tentatives avant de tourner son regard ambre vers la jument qui s'avançait bien plus calmement vers lui.

« - Pourquoi dois-tu toujours essayer d’occire tous les êtres vivants qui t'approchent ? »

Pour toute réponse la Ponyta cracha le morceau de tissu avant de lever la tête et fermer les yeux afin de lui faire comprendre qu'elle se refusait à s'expliquer. Pour un cheval de guerre, elle n'avait pas son pareil mais quand il s'agissait de devoir agir en société, le pauvre soldat se devait de la tenir en laisse et avec une muselière s'il voulait éviter le plus d'incidents possibles. Comment se faisait-il que sa mère eut été si douce alors qu'elle était une pouliche aussi ardente que les flammes de sa crinière.

Vaincu, il lui tapota l'encolure avant de rentrer chez son hôte et d'y faire ses bagages : le roi lui avait confié une mission et il devait s'en acquitter au plus vite. Il en profiterait au passage pour faire réparer son armure brisée et entraîner sa nouvelle recrue. Nouvelle recrue qui voletait autour de lui et qui de temps à autre se posait sur l'épaule du quadragénaire du moins jusqu'à ce qu'une certaine ponette ne tente de l'en déloger en essayant tout bonnement de le bouffer. Elle alla même jusqu'à entrer dans la maison et pousser les meubles qui lui gênaient le passage sans le moindre remord.

Au moins les somations du grand humain eurent raison de son entêtement et la voilà, assise tel un canidé, devant le pas de la porte à attendre que ce dernier n'ait terminé sa tâche. Bien entendu, L'Escouade avait voulu s'approcher de la pièce mais les mâchoires menaçantes de l'équine les firent changer d'option. Il fallait dire que depuis qu'ils avaient goûté à sa force, plus jamais ils n'avaient osé s'approcher d'elle. Le reste des préparatifs se passa donc dans le plus grand des calmes et une fois le combattant prêt, il incita toute sa clique à le suivre et se servi de la jument comme de porte-bagage.

Ainsi voyagea-t-il, accompagné de ses Pokémons jusqu'à la ville de Fricke. Là-bas il y avait un château et quoi de mieux que de trouver une épouse à sa majesté dans la noblesse. Aux portes de la ville, il rangea la furie enflammée à quatre pattes et récupéra le lourd paquetage. Ne restait plus qu'un seul problème et qu'il allait bien vite rencontrer : la foule qu'il y avait dans cette citée, jamais de sa vie il n'avait vu autant de monde à un seul endroit ; pas même sur un champs de bataille et le pire dans tout cela était qu'il devait supporter les habitudes décadentes de cette génération. Des femmes qui ne cachaient leur poitrine que part de mince triangles de tissu ou portant des jupe si courte qu'elles en laissaient peu de place à l'imagination.

Mais il était un représentant de la royauté, un haut chevalier de la garde royale et il devait se reprendre afin de faire bonne figure auprès de la population, aussi offusquante fut-elle. Et puis, il ne portait son uniforme, qu'il destinait à un forgeron dans cette ville, donc pour toutes ces âmes, il n'était qu'un homme parmi tant d'autres.

Un homme... paumé dans la foule qui s'amassait autour des différents stands et étales où étaient vendues toutes marchandises. Alors lorsqu'un Desséliande accompagnant un homme en blouse fut porté à sa vue et semblant imposer le respect auprès des autochtones, il s'avança vers lui en quête de réponses. Au moins avec le fait que bien peu de gens ne semblaient vouloir rester près d'eux deux, il pourrait reprendre son souffle. De toute sa hauteur, il s'avança vers celui qu'il avait désigné comme son guide.

« - Excusez-moi, brave homme. Je suis comme qui dirait perdu et j'aurai grand besoin d'aide. »

L'homme interpellé par le colosse termina rapidement sa besogne avant de prêter toute son attention sur lui. Au passage, il cala un sac sur les branches de son Pokémon, l'ajoutant à la liste déjà conséquente de ses semblables. Une bien étrange façon de se servir de cette créature mais pas non plus exempte d'utilité. Ce détail passé, le chevalier consenti rapidement à répondre à la question posée, au moins cet individu était apparemment disposé à lui venir en aide. Le ton solennel que le quadragénaire avait arboré jusque-là se fit plus embarrassé et se fut avec une émotion non dissimulée que le colosse fit part de son désarroi.

« - Pour tout vous avouer, je dois me rendre au plus vite chez un forgeron afin d'y faire réparer mon armure... du moins si le Saint Helix consent à tel miracle, vu l'état plus que déplorable dans laquelle elle se trouve. Cette ville est si grande que par deux fois je me suis égaré. Hors j'ai à délivrer une missive des plus importantes et dans les plus brefs délais au château de Fricke. »

Au moins ses deux problèmes étaient expliqués et cela pourrait peut-être inciter l'autre homme à trouver une solution qui lui permettrait d'être au plus vite dans le prestigieux édifice. Le barbu avait néanmoins conscience qu'il pouvait paraître louche ou un fou avec de telles demandes alors pour confirmer ses dires par son statut, il déposa au sol son armure afin d'y dévoiler les armoiries royales. Au moins de quoi faire comprendre à son vis-à-vis qu'il n'était point fanfaron ni même menteur. Il se racla la gorge avant de prendre la parole.

« - Excusez mon empressement et mon manque de bonnes manières. Je me nomme Adalbert Gamotte, chevalier de sa majesté et j'ai grand besoin de votre aide messire... »

Par cette phrase, il invita son possible salvateur à se présenter en s'aidant d'un revers de la main avant de refermer le sac contenant la relique abîmée. Il ne fallait tout de même pas qu'un malandrin ou toute autre personne mal attentionnée ne découvre la valeur de ce qu'il transportait dans ce vulgaire sac de lin. Et pour être certain qu'aucune œillade indiscrète ne viendrait fouiner, il pouvait compter sur son escadron qui avait déjà formé un arc de cercle autour des deux hommes, du Desséliande et de la Couafarelle, elle même en alerte.

La vue des armoiries ou de l'armure sembla provoquer une réaction tout à fait singulière auprès de son guide car voilà que ce dernier haussa un sourcil à sa vue. Aurait-il mieux fait de s'abstenir de la dévoiler à cet homme ? Ou peut-être était-ce parce que justement ce blason n'était connu que par les érudits et les historiens. Oui érudits car il avait encore grand mal avec le terme de scientifique et malgré cela il savait qu'il pouvait faire confiance à ceux qui portaient la blouse blanche pour connaître beaucoup de choses sur la nouvelle Mistral.

Tout comme naguère la populace faisait confiance aux tabards et aux amures, aujourd'hui les uniformes révélaient beaucoup d'informations sur leur porteur. Autant dire que devoir se promener en civil était une expérience des plus étranges pour le quadragénaire. Son armure avait beau être abîmée et manquer de beaucoup de ses éléments, ne pas l'avoir sur lui le faisait se sentir vulnérable. Elle était le symbole de sa foi mais aussi de ses responsabilité et sans elle, il ne savait plus réellement qui il était.

Toutefois le colosse garda pour lui ses interrogations, du moins pour le moment, et accepta volontiers la main tendue qu'il serra - peut-être un peu trop fort à cause de son enthousiasme – en guise de confiance vis-à-vis de l'autre homme.

Néanmoins la bonne humeur s'envola presque aussitôt qu'elle était arrivée, au moment où le dénommé Orion lui annonça que malheureusement il n'y avait pas de forgeron à Fricke. Lui qui pensait pouvoir trouver de son artisans dans une grande citée tombait de haut. Maintenant ils étaient relégués dans les petits bourgades ? Quel comble pour un métier pour le moins crucial à une société. Plus il en apprenait et moins il comprenait ce monde dans lequel il s'était éveillé.

« - Je vois... Je vous remercie pour ces informations. »

Se fut à son tour d'être pensif : comment pouvait-il se présenter auprès de la noblesse locale avec l'accoutrement qu'il portait en ce moment. Jamais on ne ferait rentrer un vulgaire roturier ou même un homme du peuple dans un château et il l'avait bien vu avec celui de sa majesté ; même si la garde laissait à désirer. À cette pensée, sa vieille douleur se raviva et il serra la mâchoire pour essayer de ne rien laisser transparaître.

Car voilà que son guide était une connaissance du maître des lieux. Finalement peut-être que sa quête n'allait pas être si entravée que cela et cela lui redonna espoir. Il tilta aussi quand au fait que l'individu s'annonçait être du cercle du propriétaire.

« - Vous êtes donc un noble ? Dans ce cas veuillez pardonner l'affront que je vous fait en me présentant de la sorte et vous prie, dans votre grande mansuétude, de me guider jusqu'à lui. »

Et pour couronner le tout, voilà que le chevalier mis un genou à terre, baissant la tête et posant son poing contre son large torse. Il avait beau lui-même faire partie de l'élite de la société, être débraillé et même être un déchu faisait qu'il devait lui-même courber l'échine face à la noblesse. Face à son comportement, la Couafarelle sursauta sur place et tenta de l’obliger à se relever. À continuer à agir de la sorte, il allait finir par éveiller des soupçons et elle commença même à aboyer auprès des membres de l'Escouade afin d'avoir leur aide.

Peine perdue, ils ne semblaient vouloir obéir qu'à leur chef.

Genou à terre et gardant toujours sa position, le noble déchu fut quelque peu ébranlé lorsqu'il entendit un audible reniflement. Avait-il outré la personne devant lui au point qu'il fasse part de son irritation aussi éloquemment. D'instinct son poing s'en serra que plus et le colosse soumit attendit sa sanction.

…

Qu'il se relève ? Et l'homme en suppliait même le Saint Helix, loué soit son nom, alors refusant de l'offusquer d'avantage, le brun s'exécuta derechef comme pour garder le peu de dignité que sa personne pouvait encore avoir. Duchesse soupira et s'essuya le front de l'une de ses oreilles, ils étaient passés à deux griffes de la catastrophe ! Et ce n'étaient pas ces imbéciles de l'Hexadron qui les avaient tiré de ce mauvais pas. Aussi fous et perdus que leur maître. Comment avaient-ils pu survivre jusque-là...

Bon pour l'humain, elle avait pu voir de ses propres yeux son ardeur au combat et sa force indéniable, pas étonnant qu'il n'ait pas peur des Pokémons quand elle l'avait vu les combattre sans la moindre peur. Toutefois ce qui l'avait effrayée avait été ce moment de transe où il était devenu une bête féroce et avait failli aussi bien blesser ses alliés que ses ennemis. Un vrai dément qui lui donnait encore la chair de Poussifeu rien que d'y penser. Mais au moins l'autre humain avait dénoué la situation et tandis qu'il lui offrit un regard, cette dernière inclina la tête en signe de reconnaissance.

Il fallait dire que depuis qu'il avait été lâché dans la nature sans chaperon, le chevalier d'un autre temps était livré à lui-même et arrivait à accumuler un nombre incalculable de bourdes. S'en était à se demander pourquoi il n'avait pas déjà fini en taule. Ah oui... son « passe-droit » de garde royal et son amitié avec l'un des lieutenants de la maréchaussée. En gros de quoi calmer tout le monde.

Mais voilà... si les agents de la paix n'étaient pas une menace pour le quadragénaire, il n'en était pas pareil pour les champions et mêmes du C4. Il fallait dire qu'il avait vraiment du mal à avaler l'information, surtout après que l'une de ces élites ait tué le roi juste sous ses yeux, après avoir failli le tuer. Il ne comprenait toujours pas son geste envers lui. Pourquoi l'avoir secouru ?

Maintenant englobant l'homme à la blouse blanche de son ombre, le chevalier baissa la tête pour mieux examiner le champion. Il fallait dire que s'était bien la première fois qu'il voyait un homme dans ces rangs. Entre Dame Técla et la Jézabel, il n'avait rencontré que des femmes et pensait ce titre accordé exclusivement au service 3 pièces faible. Helix soit loué, il n'en était point le cas et il lui tardait de découvrir les autres hommes redorant cette nouvelles caste.

« - Vous êtes un champion ? Je vois, en ce cas veuillez me pardonner pour ma méprise et c'est avec grand plaisir que nous vous accompagnerons jusqu'à votre arène. »

Même si les paquetages qu'il transportait ne l'affectait nullement, sachant qu'il devrait passer un certain temps dans cette bourgade, il se sentait plus à l'aise de pouvoir laisser son équipement dans un lieu à l'abri de tout brigand. Il ne se sentait pas d'humeur de pourchasser un voleur ou encore moins de couper une main.

Invitant donc son guide à ouvrir le chemin, le grand guerrier le suivait tout en essayant de ne pas regarder les tenues plus qu'osées que portaient les gueuses autour d'eux. Lui qui était habitué aux longues robes, il était servi en découvrant les maillots de bain et autres fanfaronnades des temps modernes. Toutefois il ne pu laisser échapper un murmure d'irritation.

« - Quelle décadence... »

Le temps était certes au beau fixe, le chevalier perdu dans son temps n'arrivait pas à comprendre pourquoi les gens se laissaient à se promener aussi dénudés. Même les hommes s'y mettaient ! Entre camarades sous un soleil de plomb et après un entraînement, pourquoi pas mais voilà qu'ils osaient se montrer devant femmes et enfants. Le monde marchait vraiment à l'envers pour le pauvre papy et comme pour confirmer cela, le voilà qui serra un peu plus le haut qu'il avait acheté sous les conseils de son ami Anty alors qu'il entendait son guide ricaner. Déjà que sans son armure il se sentait nu, alors s'il devait se vêtir comme les autochtones...

Heureusement la tenue du champion le rassura sur ce point. Avant de le mettre un peu plus dans l'embarras par sa question. Pour ne pas venir du coin, il n'en venait pas du tout. Pas le même lieu et pas la même époque mais pour la seconde vérité, cela allait être quelque peu difficile à dévoiler. On lui avait fait bien comprendre à maintes reprises : mieux valait laisser sous silence ce détail au risque de finir dans un hospice d'aliénés.

Les humains, avec l'aide des Pokémons, pouvaient voyager d'un bout à l'autre d'une contrée en fort peu de temps, par contre provenir d'une autre époque n'était pas considérer comme réalisable. N'avaient-ils point si peu croyance en le Saint Helix pour douter de tels miracles ? Peut-être devrait-il prier deux fois plus afin de le faire pour eux.

« - En effet, je viens de fort loin. Je suis originaire de Carcakrok. »

Au moins ceci n'était pas un mensonge, le Saint Nautile ne lui en tiendrait pas rigueur pour ces quelques mots. Devoir vivre sans mentir alors qu'il devait cacher sa véritable identité était une épreuve de chaque instant. Au moins ses pas l'avaient guidés jusqu'à à champion et non un quelconque malandrin, le verre était à moitié plein et ce dernier lui donnerait même accès au château malgré le fait que sa venue ne se fasse pas de manière officielle. Il aurait une forte dette envers cet homme, qu'importe ce que ce dernier pourrait dire.

« - Je dois avouer que je suis quelque peu perturbé par les coutumes de votre ville. J'ose espérer néanmoins ne pas dénoter avec les environs. »

Même si toutes ces exubérances n'étaient pas de son goût, il n'était pas dans sa ville alors il devrait se plier aux coutumes locales, aussi frivoles soient-elles. En tout cas, ses nombreuses réactions : rougeurs et regards fuyants semblaient amuser son guide. Heureusement que ce dernier ne le jugeait pas...

Ainsi lorsque leur destination s'annonça, se fit avec un grand soulagement que le musculeux colosse pourrait retrouver la quiétude d'un lieu moins touristique. Toutefois, il était quelque peu curieux de découvrir à quoi pouvait bien ressembler l'intérieur de l'antre d'un champion. Était-ce luxueux ? Prévu pour protéger les habitants de sa ville ? Curieux mais toutefois soucieux de ne pas perdre messire Orion de vue, il examina l'endroit tout en ne s'éloignant pas trop.

« - Champion de type spectre, vous m'avez dit ? Quels genres d'épreuves attendent vos adversaires ? »