Saison Un

: Obscure Prophétie

Le bruit sourd d’un coup de pied se fit entendre, des crépitements, des petits cris de détresse. Tim regarda Tom d’un air désabusé, l’avait-il fait exprès ? Autant ses méthodes d’élevage pouvaient être drastiques et sa cuisine quelque peu violente par moment, jeter ainsi un Pokémon dans un brasier ne leur ressemblait pas. Alors que le Miamiasme se tortillait dans tous les sens pour éteindre les flammes, il finit par rouler en dehors du feu de camp et s’enfuit comme un petit sac à vidange aux oreilles fumantes là d’où il venait, pleurant toutes les larmes de son corps : « C’sont d’choses qu’arrivent. » ponctua-t-il à la remarque de son frère sur le poids du Pokémon… Faut dire que aussi radicale que la méthode eût été, il n’y avait plus de trace du pokémon… à part une odeur de pneu brûlé et un silence nocturne des plus lourds. Le croassement d’un Cornèbre n’ajouta pas plus de gaieté à ce qui venait de se passer.
Timothée se gratta l’arrière du crâne, visiblement gêné et pris au dépourvu, coupé dans son élan. Il expira de l’air comme une machine à vapeur pendant quelques secondes, réfléchissant à la proposition de son frère. C’est qu’il n’avait pas forcément sommeil après tout ça mais faudrait bien se reposer quand même : « Faut dormir à soèr. Pas b’soin d’leur ostie d’patente pour m’coucher. lança-t-il en direction des bâtisses de Fricke. L’ciel yé beau. S’t’veux un déjauner d’main fa qu’tu mattes des trappes. »

Les minutes passèrent, presque une heure, Tim s’était couché en même temps que son frère et regardait le ciel étonnamment clair si on le comparait aux obscurs évènements de ces dernières semaines, voire mois. Tim, grand rêveur, dit tout haut sans lâcher le ciel étoilé des yeux : « J’aimerais dont bein ça m’trouver d’quoi pour mes nouveaux troupeaux… T’sé. Joufflu se blottit contre son père d’adoption dans des petits bruits de rongeur. M’mân l’aime pas t’voér comme çô. il chercha le regard de son frère mais jugea qu’il se devait de spécifier. Pis l’est pas l’seule, mettons. D’puis qu’Gravel l’plus lô… »
Et puis Timothée s’arrêta, était-ce à cause de ce qui semblait avoir été un grognement de son frère ou juste une sensation d’avoir abordé un sujet encore trop sensible ? Sans doute. Il se ravisa. Un silence plana quelques instants et puis Tim creva l’abcès, de la façon la plus douce qu’il lui vint à l’esprit : « C’que t’gardes tout en’d’dans. Pis après t’es en criss contre tout l’monde. » ; Ca ressemblait plus à un reproche qu’autre chose, pourtant il l’aimait son frère, plus que tout, il n’avait pas les mots, en un sens lui-même était profondément meurtri par la disparition de ses propres pokémons et de ses troupeaux. Peut-être que justement, à avoir tant de bestiaux il n’avait pas pu former de liens émotionnels aussi forts que ceux que son frère avait tissé avec les siens. Après tout, Tom et son équipe étaient redoutables. Ils étaient tombés sur plus redoutables qu’eux, voilà tout.

Le sac à vidange se sauva sans demander son reste, ne laissant derrière lui qu'une traîné à la forte odeur désagréable. Tom n'était pas très fier de son coup, mais ce qui était fait était fait. Impossible de revenir en arrière aussi, il choisi de ne plus y penser. Surtout que Tim argua dans le même sens que lui. Une erreur était effectivement une chose qui pouvait arriver. Le duo était bien placé pour le savoir avec le nombre de fois qu'ils en avaient enchaîné!

Le sujet revint donc sur plus urgent. Pioncer. Il était Hélix sait quelle heure de la nuit et la journée avait été longue. Son cadet approuva rapidement l'idée de camper un soir de plus, exigent sans gêne que c'était à lui de poser des trappes. Un sourire amusée étira les traits de l’aîné. Mais oui! Si LUI voulait à manger hein? Pas son gros glouton de jumeau sur patte? Pff, une excuse facile pour dire que Timothée espérait avoir quelque chose de frais à se mettre sous la dent le lendemain matin. Thomas pouvait sauter un repas, voir plusieurs. Bon, ça le mettait en rogne, mais il pouvait le faire. L'éleveur lui? Il n'y avait pas pire idée possible, un plan pour qu'il s'évanouisse de faiblesse dès qu'ils quitteraient le campement car il n'aurait pas manger. Secouant la tête, amusée, Tom entreprit de poser des trappes sans contredire l'autre.

Cela lui prit un moment pour faire le tour du campement, placer quelques pièges bien pensée dans l'espoir d'avoir une belle prise au levée du jour. Tant que le machin se mettait pas à hurler à mort pendant qu'ils dormaient! Une fois satisfait, le garde chasse s'installa enfin pour la nuit après avoir ravivé le feu. Couché sur le dos, le bûcheron fixa le ciel étoilé pour des raisons tout autre que le rêveur qui l’accompagnait. Il cherchait à retrouver les constellations qu'ils connaissaient, histoire de valider leur position par rapport au village. ''Hum?'' Bon, de quoi il parlait encore? Loin de lui répondre, la suite le prit par surprise. Quoi? Comment sa leur mère n'aimait pas... Pas quoi? Il parlait pas de son élevage lui? Le regard curieux de Tom se posa sur celui de Tim qui éclaira aussitôt sa lanterne.


Un froid s'installa. Grognant, le bûcheron se détourna du cuisinier. Il était pas possible ce type! C'est pas comme si ça le regardait, lui ou quiconque en fait ce qui c'était passé! Serrant les poings, Tom lui aurait probablement hurlé dessus si une vague de désarroi ne l'avait pas frappé avec autant d'impact. Il réprima un frisson, cherchant à ignorer la détresse qui cherchait à ressurgir. Lui et leur mère pouvait bien penser ce qu'il voulait, les sentiments restaient une faiblesse dans son domaine. Tout encaisser, vivre avec et attendre que ça passe, c'était la seule vrai façon de faire. Ne trouvant pas sa voix, il se contenta de balancer un bon coup de coude dans le dos de son imbécile de frère pour l'inciter au silence, confirmant par le fait même que oui, il était facilement en criss contre tout le monde depuis les derniers événements. La nuit risquait de ne pas lui apporter bien du repos finalement!


Grognant, Tom se réveilla assez rapidement. Les premiers rayons du soleil se pointait à l'horizon. D'ici une heure, le soleil serait levé. Loin de pouvoir retrouver le sommeil malgré sa courte nuit, le bûcheron se leva pour faire le tour de ses pièges. Rapidement, il du se rendre à l'évidence, il n'avait rien prit. Bon. Il avait la dalle et Tim allait être de mauvaise compagnie pour des heures s'il ne trouvait rien. Remballant ses trappes, le garde chasse ranima le feu mourant avant de se mettre en marche. L'autre dormirait bien encore un bon bout de temps, il pouvait aisément s'éloigner pour aller chasser un peu. Branche sur les talons, il s'éloigna du campement sans penser un instant que cette fois, il avait mal jugé le cycle de sommeil de son jumeau.

Un bruit sourd et un impact secouèrent le corps lourd de Tim. Il aurait dû savoir, comprendre qu’il était encore trop tôt. Il n’en parla plus, se mura dans le silence de la nuit et ils se laissèrent tout deux emporter par le sommeil qu’une longue journée de marche avait apporté.

Tim ouvrit un œil, le soleil se levait à peine sur Mistral. Les Roucools chantaient paisiblement, la nature reprenait ses droits, l’espace d’un instant éphémère, la ville et les hommes n’existaient plus. Timothée aimait cette proximité – parfois forcée – avec son environnement. Son village lui manquait déjà, la neige lui manquait, tout lui manquait. Il se retourna pour voir si son frère dormait encore mais ne vit rien. Pas même son sac. Le feu crépitait, bien trop vivement pour que s’eût été un feu vieux de la veille. Tim se releva, regarda autour de lui. Où était Branche ? Où était Thomas ? Un profond désarroi se lu sur le visage du gros Hortons. Impossible, il n’aurait jamais osé.
Tim sauta aussi vite que son poids le lui permettait sur ses jambes, se passa la main sur le visage d’une force à lui arracher le nez et tourna sur lui-même comme une toupie : « TOM !? TOM ! C’pâs drôle çô lô… TOM ! » ; Mais aucune réponse, le chant des Roucools fut sa seule compagnie. Tim eut cette douleur propre à la perte : une aiguille, fine et perçante, traversant son cœur pour en tirer un fil. Et l’aiguille repassa, jusqu’à ce que des larmes naquirent dans le coin de ses yeux. Tom l’avait laissé là, il devait se rendre à l’évidence, il avait mis ses menaces à exécution… Était-ce car il était trop lent ? Trop bavard ? Ou parce qu’il avait parlé de Gravel ? Ou de maman ? Ou tout ça à la fois ? Était-il en colère ? Blessé ?... : « Tom ! » cria-t-il d’une voix demi-étouffée par son chagrin qu’il tentait de contenir et qui n’avait sans doute pas porté bien loin.

Une graine, qui avait été là sans doute depuis leur enfance germa. Une colère grandissait en lui comme une liane vigoureuse. Tim était en colère, mais plus que tout, outré, trahi, insulté. Il l’avait laissé, lui, son propre frère jumeau, son petit frère. Quel genre de frère fait ça ? Certes leur relation avait toujours été conflictuelle, mais toujours dans un respect fraternel et jamais ça n’était allé trop loin. Sauf cette fois-ci.
Tim considéra un instant rentrer chez eux. Il l’attendrait là-bas, pour lui mettre son poing dans la gueule et le laisser s’expliquer après, s’il avait encore toutes ses dents pour en articuler des excuses, tant mieux. Mais non, ç’aurait été lui donner raison, reconnaître cette faiblesse sur laquelle Thomas adorait appuyer. Tim ne serait pas le fils à maman et l’incapable qu’il décrivait. Il allait trouver lui-même la cause de tous ces maux et revenir avec des réponses, et si jamais il le retrouvait, ils auraient deux mots à se dire. Gauche et droite. Et en parallèle, il reformerait son troupeau, prouvant ainsi à Tom sa valeur, celle qu’il a toujours chercher dans le regard de son frère sans jamais la trouver.

Timothée racla d’un pas lourd la terre et jeta une bonne quantité de terre sur le feu dont la flamme diminua de volume. Puis un autre. Et bientôt seule une mèche de fumée s’échappait du camp. Il rassembla ses affaires, mis son sac à dos et repris la route : « C'toé et moé mat'nant, Joufflu. »

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Il avait finit par attraper …  Quelque chose. Tom ne connaissait pas l'espèce, mais peu lui importait. Le truc semblait tout ce qu'il y a de comestible et avec Tim pour jouer les cuistot, il était plutôt certain de pas finir empoissonné. Lui et Branche avait rapidement reprit le chemin du campement basique qu'ils avaient installé la veille. Par contre, loin de le retrouver dans un état similaire à comment il l'avait laissé, le bûcheron remarqua rapidement que quelque chose clochait... Et que quelque chose d'encore plus imposant était manquant.

Le cœur battant, un peu paniqué, le ranger parcouru la distante restante dans un sprint digne des plus grand coureur nain. Son ancêtre Gimli serait fier de lui! Le feu était mort, recouvert de terre. Des volutes aussi étouffées que l'air dans ses poumons s'échappaient avec difficulté. Et Tim? Nulle part en vue. Ne pas voir un pachyderme de deux cent quelques livres habillé en chemise carreauté rouge en pleine forêt serait un exploit. Pourtant le garde chasse se retrouva a prier silencieusement pour l'accomplir. Timothée ne pouvait juste pas s'être envolé non? Il laissa tomber son sac et le gibier et repartit tout comme Branche parvenait enfin à le rattrapper.

-TIM! TIIMMM! T'es où tabarck! Hey jéribouère... TIMM!

Il tourna autour du camp, appelant son frère dans toutes les directions sans pour autant entendre sa voix lui répondre. Soupirant, incertain de la marche à suivre, il retourna auprès du feu. Ce dernier avait été éteint volontairement... Tim avait eu le temps de ramasser son matériel. Aucun signe de bagarre, pas la moindre trace inhabituel autour du feu. Son cadet s'était simplement barré sans lui. Vidé de toute énergie, le ranger se laissa tomber au sol. Il fixa longtemps l'endroit où la veille, ils avaient échangé ce qui se révélait aujourd’hui être leur dernière conversation. Le plus jeune avait parlé de leur mère. Il avait parlé de Gravel... Des choses que l’aîné ne voulait pas aborder.

Était-ce trop demandé pour une fois de faire ce que lui voulait? Il avait toujours fait le travail que son père avait exigé de lui. Il avait toujours donné sa part à son frère, accepté les jeux que lui voulait. Il avait toujours baissé la tête devant les remontrances de sa mère et accepté qu'elle ne l'aimerait jamais autant que Tim. Alors pour une fois, pour une fois qu'il tenait mordicus à quelque chose... Il fallait vraiment que sa déplaise trop à l'autre et qu'il se barre? Son désarrois se transforma en colère. Et bien soit! Qu'il aille se perdre tout seul dans un coin alors! C'est pas comme s'il avait quitté le village par plaisir de toute façon! Il avait plus important à faire que traîner un incompétent qui le ralentissait et gémissait constamment. Oui, c'était beaucoup mieux ainsi.

Reprenant ces affaires, Tom reprit la route, une Branche désemparée sur les talons.

Rp terminé