Saison Un

: Obscure Prophétie

Ma maison de Roc était emprunte de l’odeur du deuil. L’air y était lourd dans cette brume mystique. Jéricho et Minerva était déjà à l’intérieur. Leurs blessures avaient été bandées, mais ils étaient encore trop faibles pour se lever. Ma Lucario gémissait lorsqu’elle tendait de bouger la partie gauche de son corps. A ses côtés, War et Muse, devenue Mackogneur depuis, la regardaient avec tendresse. Ils étaient atterrés et un peu confus. Minerva allait s’en sortir, mais elle risquait d’en garder des séquelles.

Tout le monde avait cependant compris que ce n’était que la partie visible de l’iceberg. Ponik et Muse avaient noté l’absence de Cuirassé. Il était dehors, dans un repos éternel. La seule à ne pas comprendre : Chemo. La crabominable était trop bête pour comprendre la chose.

Je regardais les trois pokemons qui n’avaient pu être présent pour la bataille. Peut-être pour le meilleur. Ma voix, ma face était toujours dans cette neutralité, mais mes pokemons savaient. Une tempête rugissait en moi.

« Il est dehors. »

Ponik hocha la tête, mais ne préféra pas sortir. Muse se leva lentement. Elle voulait le voir. Elle le devait pour faire son deuil. Chemo ne comprenait toujours pas. Elle sortait, un sourire béat aux lèvres. Pendragon les suivit. Il allait devoir expliquer la chose.

« Lior, tu veux bien venir avec moi ? »

Mes autres pokemons préféraient rester à l’intérieur. Colossus se trouvait déjà dehors de toute façon. Une fois devant le corps, Muse détourna rapidement le regard. Chemo, elle, même avec sa connerie, perdit vite son sourire. Son ami ne bougeait plus. Elle se rapprocha, tapotant le corps avec sa grosse patte.

« Crabo ? »

Ma main vint pour attraper celle de Lior et la serrer. N’importe quel humain aurait sa main brisée, mais pas Lior. Et ce simple mouvement était la seule chose qui trahissait mes émotions. Moi, Técla Thélafasse, connue pour son manque d’émotions, cherchais un soutien émotionnel. Le pire ? Je ne m’en rendais même pas compte. Je l’avais fait par pur instinct.

« CRABO ? »

Ses coups de pattes étaient plus insistants encore. Des larmes lui montaient aux yeux. Ma main se serrait davantage. Quelle facilité pour extérioriser ses émotions. Son appel augmentait pour se terminer en murmure.

« CRABOMINABLE ! Crabo… Minable… »

Elle avait compris. Cuirassé était mort. Il ne serait plus jamais là pour jouer avec elle. Je regardais le ciel embrumé.

« Rentrez tous, sauf toi Colossus. Lior, tu veux bien les surveiller… Je veux creuser la tombe, moi-même. »

Et je les laissais aller. Mes pokemons rentrèrent. Lior, je ne sus ce qu’elle déciderait, mais je pris la pelle et je commençais à creuser la terre de mon jardin. Une tombe pour un héros. Une tombe pour un partenaire. Une tombe pour un disciple. Une tombe pour un ami. Une tombe pour un fils.

Chaque coup de pelle dans le sol était un coup dans mon cœur. Chaque coup de pelle me rappelait la dure réalité. Cuirassé était mort. J’aurais beau protester, crier ou marchander. Il était mort et il resterait mort. Je soulever des kilos de terre comme si de rien n’était. Mon cœur peinait. Mais rien ne sortait. Pas une larme. Je finissais par lâcher ma pelle, tombant à genou. Qu’est-ce qui clochait chez moi ? Comment avais-je pu devenir cela ? Un être incapable de verser une larme ? Cet enfant à qui j’avais arraché un bras, je n’avais aucun remord, pas le moindre regret. Etais-je encore humaine ? Pouvais-je encore être considérée comme une humaine ?

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A l’intérieur de la batisse, mon cœur chargé de tristesse commença à devenir colère. Minerva était dans un piteux état. Cuirassé était mort ? Pour qui, pour eux ? On vivait très bien avant eux. On aurait eu à ne subir aucune perte sans eux. Mes poings se fermèrent. Mes yeux quittèrent Minerva pour se porter sur les trois qui rentraient.

Je n’avais jamais eu beaucoup d’intérêt pour Chemo, mais la voir ainsi me faisait mal. Elle souffrait plus que nous. Et elle devait subir ça à cause d’eux. Mon regard chercha Lior. Toi, responsable de cette situation. Je me levais. N’importe qui autour de moi pouvait sentir la chaleur que je dégageais. Corps de diamant ? J’allais lui rappeler la dure réalité.

Mais que vois-je ? Pendragon se tenait en face de moi. Je n’avais pas le temps pour tes élans de chevalier. Je n’étais guère d’humeur à bavarder.

« Braségali (hors de mon chemin). »
« Gallame ? Galla ? (Tu crois que c’est la chose à faire ?Ce que Minerva veut ? »

Un soupir dédaigneux. Avais-je dit que je n’étais pas d’humeur ? Mon poing, précis, chirurgicale, accompagné d’un Rapace, le toucha en plein ventre. Le fameux chevalier se retrouva projeter au plafond. Je sentis le contrecoup dans mon corps. Tu étais la prochaine, Lior… Ou alors Gunter ? Il n’y avait aucune raison que vous vous en soyez sortie indemnes et pas elle.

Mais alors que je comptais avancer, une lame violette d’énergie me frappa sur l’épaule. Bordel. Pendragon. Un genou se posa au sol. C’était puissant. Fais chier… Il voulait un combat ?

« GALLAME ! (Arrête cette folie) »

Il était réapparu grâce à son téléport. Il savait que je n’abandonnerais pas. Mais alors que j’allais charger un rapace et lui un coup psycho, une ombre passa devant nous avant de tomber au sol. Minerva ? Elle devait rester alité ! Je m’arrêtais de combattre, me penchant.

«Lu…ca…riooo. (Arrêtez…Técla… Aide dehors.). »

De quoi parlait-elle ? Tiens, Chemo n’était plus là et, c’était quoi ce bruit dehors ? Il y avait du mouvement. Merde. Non, non…. On se regardait tous. On savait plus ou moins ce qu’il allait se passer.

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J’étais en pleine pensée quand j’entendis le bruit. Il se passait quelque chose à l’intérieur, déjà, j’y allais. Il me fallait voir ce qu’il se passait. Mais en chemin, Chemo sortit en trombe de la maison. Hein ? Je la regardais un instant incompréhensive. Elle fonçait vers Gazo… Non…

« Chemo, arrête ! »

Trop tard, elle était déjà partie. Elle ne m’entendait plus. Colossus, cependant, usa de son poing ombre pour apparaitre devant Chemo, faisant barrage de son corps entre le close-combat et Gazo. Je courrais déjà vers elle. Je l’attrapais par derrière, la soulever avant de l’envoyer valser. Elle n’avait pas pris beaucoup de dégâts. Moi non plus… Du moins mon corps.

Mon cœur était au bord de l’explosion. Ne vous battez pas entre vous. Pas maintenant. Je n’aurais pas la patience pour ça. Déjà, elle se relevait incompréhensive. D’ailleurs, mes pokemons étaient tous sorti. Minerva était soutenue par War qui était blessé, comme Pendragon. La colère, la tristesse… Un mélange complet d’émotions implosa.

« VOUS PENSEZ QUE C’EST LE MOMENT ? VOUS PENSEZ QU’IL EST MORT POUR CA ? Ce n’est pas la faute de Gazo. Ce n’est pas la faute de Lior ou de Gunter tout ça. C’est ma faute. »

Mes poings s’ouvrirent. J’étais las.

« C’est ma faute. La mienne. C’est moi qui ai pris les dispositions de la bataille. J’ai été mauvaise. J’ai échoué. Je suis désolée. »

Je tombais à genou. J’avais échoué, comme chef, comme guerrière. Mon père avait raison. Je n’avais pas ce qu’il fallait. Et à l’instant où je devais être forte, je craquais. J’étais une bonne à rien. Tant de colère, tant de frustration accumulée. Mon poing s’abattit dans le sol, laissant la trace de mon poing.

« Si vous voulez vous en prendre à quelqu’un, c’est à moi seule. Alors je vous en prie… Arrêtez. Je ne veux pas voir ma famille se brisait. Pas encore une fois. »

Une larme coula. Puis une deuxième. Je ne pense pas que c’était Cuirassé. Pas seulement. Tout ce pourquoi j’avais vécu se retrouvait malmener. La tristesse, j’avais oublié ce sentiment. Toutes les émotions que je gardais enfoui, tout explosait. J’avais beau être forte. Là, j’étais faible. Mais aucun pokemon ne vint me réconforter, mais ils s’écartèrent. Une voie d’honneur pour un bouclier.

Je me laissais faire. Je me laissais prendre dans les bras de mon être le plus cher. Je n’allais pas m’effondrer davantage. Pas de crise de larmes, pas de sanglotements, juste de légères larmes. Je l’écoutais. Elle voulait me réconforter, prendre une partie des responsabilités. Mais c’était peine perdue pour moi. Qu’ils aient été trop faibles ne changeait rien. Qui partait à la guerre sans évaluer sa force ? Des inconscients.

Mais pouvais-je prévoir ça ? Aurais-je pu prévoir ça ? Peut-être. J’aurais dû au moins évaluer cette possibilité d’un Ultralaser obscur. J’aurais dû le neutraliser d’une quelconque façon. J’étais tellement concentrée sur le cavalier que j’en avais oublié le cheval. Grossière erreur de ma part.

Je l’écoutai, sans broncher. Je restais aussi dans un silence de marbre à ses remarques. La frapper ? Non, pas en ce moment. Je n’avais aucune envie de violence. Je ne la frapperai jamais pour me défouler. Enfin, si, mais pas dans le même contexte. La seule chose que je fis était de faire signe non de la tête.

Me relever ? Si elle voulait. Je la regardais faire. Depuis quand faisait-elle de tels discours ? Depuis quand étais-je si émotive ? Mon cœur battait. Je le sentais battre dans ma poitrine. Je regardais l’équipe de Lior, puis la mienne. Un moment de flottement.

Minerva essaya de faire un premier pas, mais War ne la suivit pas. Ce fut Muse qui la soutint jusqu’à Lior. Elle posa une de ses pattes sous le menton de Lior, lui soulevant la tête. Son regard rouge se porta ensuite sur Ama. Ma Lucario souriait. Pendragon fut le suivant à arriver, posant sa main sur l’épaule de Gunter.

Chemo, perdue, s’approcha de Gazo, se posant à côté. Elle était perdue. C’était un allié ou non ? Elle resta statique, pleurant chaudement. Qui restait-il ? Jaws et Ponik étaient hésitantes, mal à l’aise même. Elles qui n’avaient jamais essayé de s’incruster dans le reste de l’équipe se voyaient être embarquées dans cette famille. Au final, elles préférèrent rester à l’écart. Colossus s’approcha, véritable colosse, et posa délicatement ses grosses mains sur Jiricho et Chtulhu. Il ne manquait que War. Son cœur et son orgueil s’opposaient. Au final, il partit vers la tombe creusée.

« Il vous pardonnera. »

Mes larmes avaient séchées alors que je voyais nos deux équipes s’accepter. Certes, quelques membres étaient récalcitrants, mais il y avait une fusion qui s’opérait.

« Colossus… Peux-tu ? »

Le géant hocha la tête. Il se leva et alla près du corps de Cuirassé pour le transporter jusqu’au trou. Pas de cercueil. A quoi bon ? On ne faisait ça que pour les vivants. Je respirai un grand coup et j’ouvris la marche. Je m’apitoierais sur mon sort après. Un mouvement de groupe jusqu’à la tombe. Serait-il heureux en nous voyant ainsi ? Je fixais son visage. Sa mort avait été violente, mais comment pouvait-il avoir l’air si paisible ? Ce pokemon avait compris quelque chose que je n’arrivais à cerner.

« Si quelqu’un veut dire quelque chose, qu’il y aille. »

Moi ? Je n’avais rien à dire. C’était trop tard pour les mots.

Lior et son équipe furent investis d’une forte volonté de rendre hommage de Cuirassé. Lior prit la parole en premier. Oui, Cuirassé l’adorait. Plus que moi. Enfin, je le pensais. Je ne lui avais jamais permis d’exprimer tout son amour. Lior lui permettait. Oui… Mon regard se leva vers le ciel. Il y avait-il réellement un monde après celui-ci ? Je ne m’étais jamais posée la question. En vérité, cela n’avait rien de réjouissant. Nous ne finirions pas au même endroit. Il était bon. Moi, je n’étais qu’un être d’égoisme pur. Je le savais et je n’avais même pas l’intention de changer.

Je ne pris même pas la peine de baisser les yeux quand Gazo commença à parler. Je ne pouvais en comprendre le sens. Quoiqu’il en soit, une fois qu’il eut fini, Pendragon lui tapota un cristal. Il ne voulait guère plus de conflit. Il se sentait aussi un peu responsable de tout cela. Il aurait pu essayer de téléporter plus de personne… Je crois que, au final, tout le monde portait sa croie.

Les pokemons des ténèbres prirent le temps de faire une prière intérieure. J’attendis patiemment. Au final, une fois que tout le monde finit de se recueillir, Jaws s’avança. Elle libéra un mini-tourbisable qui remplit la tombe de sable. War y posa ses deux mains et il s’embrasa d’un Boutefeu faisant chauffer le sable qui devenait liquide. Pendragon supervisait le processus. Cela allait prendre du temps. Et j’avais besoin de quelque chose que je n’avais pas pris depuis longtemps.

« Allons-y… Ils vont mettre un certain temps à finir… Et Jirocho et Minerva doivent encore se reposer… Faites plutôt comme bon vous semble…Je suis las de diriger qui que ce soit. »

Mes pas me portèrent jusque chez moi. Mes pokemons me suivirent. Seul Golemastoc, trop grand pour entrer, Jaws, War et Pendragon, qui veillaient à préparer le cercueil. Minerva retourna rapidement se coucher. Tout le reste de mes pokemons restait dans le salon-living qui avait l’air bien petit d’un coup. Moi, je partis dans la cuisine.

Et j’allais chercher dans mon armoire. Deux verres et une bouteille de pastis, que je gardais pour les facteurs. Disposant deux verres, j’attendis Lior. Et je posais une question fatidique et dont la réponse allait changer toute la vision que Lior pouvait avoir de moi.

« On boit un verre ? Mais je préfère te prévenir… Je suis différente après avoir bu. »

Elle me suivrait dans ma beuverie. Enfin, ma beuverie… Cela risquait de vite arriver. Je remplis les deux verres. Saisissant le mien, je fis tournoyer le liquide, pensive. Hm, j’avais besoin de me changer les idées, même si ça risquait d’être violent.

« Je ne sais pas si tu as remarqué, mais je ne prends jamais rien à base d’alcool. Je tiens pas du tout l’alcool en fait. »

C’était un peu humiliant à dire. Une guerrière de mon niveau qui ne tenait pas l’alcool. Mais avec Lior, j’osais un peu plus confier cette faiblesse. Je soupirai.

« Il me suffira d’un verre pour partir en du grand n’importe quoi. Enfin, tu verras bien. A Cuirassée. »

Je levais mon verre et, avant de le porter à mes lèvres, je rajoutais une dernière phrase.

« A demain. »

Et j’engloutissais le liquide. Au début rien de bien particulier, mais très vite, le rouge me monta aux joues et j’attrapais une bouffée de chaleur. Je me sentais un peu tangué. Oula, je scrutais Lior un moment, avant de me lever, ayant quelques difficultés à retrouver mon équilibre. J’avançais, me débrouillant encore assez bien jusqu’à me mettre face à Lior.

Je la scrutais avec attention, j’approchais mon visage du sien et, dans le plus grand calme et sérieux, je lui touchais le bout du nez avec mon index.

« Boup. J’ai touché ton nez. »

Et je trouvais ça… Drôle. Tellement drôle que j’en tombais par terre, riant avec force. Quoi ? Comment ça, c’était pas drôle ? Enfin, j’ai dit un truc qui venait de nulle part. C’était marrant, non ? En tout cas, je trouvais ça marrant. Bon, il fallait me calmer. Je la regardais un moment, avant de me redresser d’un bout. Hé, j’allais très bien. J’avais réussi ça. Oui, bon, j’avais titubais derrière et j’ai dû me rattraper au mur pour pas tomber.

Reprenant la bouteille, je bus directement à la bouteille m’asseyant sur la table. Après une bonne gorgée, je tendis la bouteille à Lior.

« Tiens, cadeau. Enfin, je trouve ça dégueu. Mais c’est marrant quand j’en bois, je trouve tout marrant. Et… »

Je regardais le plafond. Heu… Je voulais dire un truc.

« Bof, j’ai oublié. C’est que c’est pas grave. Moi, je veux m’amuser ! »

La logique ? Abandonnez, j’étais déjà trop loin.